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Une biosignature potentielle dans les nuages de Vénus ?

C’est une annonce majeure : une biosignature aurait été détectée dans les nuages de l’atmosphère de Vénus.

Vénus l’infernale

Situé à près de 40 millions de kilomètres de la Terre, Vénus est notre plus proche voisine. Elle est pourtant depuis plusieurs décennies et la fin des missions soviétiques du programme Venera un peu délaissée par les différentes missions des agences internationales (hormis par la JAXA, l’agence spatiale japonaise, avec sa sonde Akatsuki), au profit de Mars. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer, la principale étant sans doute que Mars est une meilleure candidate pour la recherche d’une vie extraterrestre, passée ou présente.

En effet, avec une température au sol d’environ 450°C, une pression insoutenable de 90 fois celle de la Terre, des pluies d’acide sulfurique, difficile d’imaginer de sémillants petits hommes verts (ou rouge) humanoïdes courir à la surface de Vénus… Et impossible d’y poser un jour le pied, contrairement à Mars.

La donne pourrait bien changer en ce qui concerne les destinations de prochaines missions d’exploration spatiale, puisque c’est bien sur la discrète Vénus que des traces potentielles de vie extraterrestre auraient été découvertes…

I want to believe

Commençons déjà par les précautions d’usage : une vie extraterrestre n’a pas été concrètement découverte ; il faudrait plutôt parler de la découverte d’indices convaincants en faveur de vie extraterrestre. C’est ce qu’on appelle une biosignature.

De la phosphine a donc été détectée dans les nuages de l’atmosphère de Vénus. La phosphine est un gaz hautement toxique, produit par certains types de microbes vivants dans des environnements sans oxygène.

Les chercheurs à l’origine de cette découverte, originaires notamment  du Massachusetts Institute of Technology (MIT) aux Etats-Unis, de l’Université de Cardiff et de l’Université de Manchester (au Royaume-Uni) ont réalisé cette découverte à l’aide du télescope James Clerk Maxwell à Hawaï et du réseau d’antennes Atacama Large Millimeter Array au Chili.

Le télescope James Clerk Maxwell. (crédits : William Montgomerie)

Evidemment, les chercheurs ont tenté de déterminer comment ce gaz pouvait être produit autrement que par des organismes vivants. Des traces de phosphine ont déjà été découvertes sur Jupiter, mais dans des environnements où les températures sont extrêmes, ce qui n’est pas le cas dans l’atmosphère de Vénus. C’est pourquoi la phosphine est considérée comme une excellente biosignature sur les planètes rocheuses.

Sur Terre, la phosphine est produite par des microbes qui n’ont pas besoin d’oxygène. Puisque Vénus n’a pratiquement pas d’oxygène dans son atmosphère, c’est un autre indice pouvant suggérer que le gaz provient en fait de microbes.

Cette potentielle vie pourrait aussi expliquer la présence de mystérieuses stries sombres qui apparaissent sur les images en ultraviolet des sondes spatiales.

Les stries sombres de l’atmosphère de Vénus sont particulièrement bien visibles sur cette image de la sonde Mariner 10. (crédits : NASA)

La température à la surface de Vénus étant bien trop chaude pour que la vie telle que nous la connaissons puisse se développer, les scientifiques à l’origine de cette découverte supposent que ces bactéries vivraient dans les nuages de Vénus, entre 48 et 60 kilomètres au-dessus de la surface, où les températures varient entre 0 et 90°C.

Le plus remarquable, c’est que des chercheurs supposaient déjà depuis de nombreuses décennies la présence d’une vie vénusienne, précisément dans cette zone. Ainsi, dans un article paru en 1967, le physicien Harold Morowitz et le célèbre astronome Carl Sagan écrivaient :

Alors que les conditions de surface de Vénus rendent l’hypothèse de la vie là-bas invraisemblable, les nuages ​​de Vénus sont une histoire complètement différente.

Selon les modèles actuellement en vigueur, Vénus aurait été habitable il y a de cela quelques milliards d’années. Il est théoriquement possible que lorsqu’elle est devenue moins hospitalière, la vie qui essaimait alors à la surface se soit adaptée et réfugiée dans cette étroite zone de l’atmosphère vénusienne.

La zone tempérée de l’atmsophère de Vénus. (crédits : Seager et al. / Astronomy.com) 

Go go go !

Prochaine étape ? Effectuer d’autres observations, pour mesurer d’éventuelles variations quotidiennes ou saisonnières de la présence de phosphine, et rechercher d’autres biosignatures. Confirmer également que ce gaz ne peut pas être produit par autre chose que des organismes vivants.

Et ensuite ? Digérer cette nouvelle, qui si toutefois elle était confirmée serait probablement l’une des plus importantes de l’histoire de l’humanité. Si la vie extraterrestre existe sur deux planètes différentes de notre Système solaire, alors elle est sans doute abondante dans l’Univers.

Et puis, évidemment, envisager une mission spatiale, pour enfin rencontrer nos chers et si précieux voisins, ceux qui nous feraient alors dire que non, définitivement, nous ne sommes pas seuls.

(crédits image de couverture : JAXA / ISIS / DARTS / Damia Bouic)

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