Astrophysique – Dans la Lune Vers l'infini, et au-delà ! Sun, 07 Nov 2021 19:06:09 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=5.8.2 https://i1.wp.com/dans-la-lune.fr/wp-content/uploads/2020/11/cropped-Dans-la-lune-favicon-couleur.jpg?fit=32%2C32&ssl=1 Astrophysique – Dans la Lune 32 32 7541914 #2 Laniakea, continent de galaxies /2021/09/22/2-laniakea-continent-de-galaxies-daniel-pomarede/ /2021/09/22/2-laniakea-continent-de-galaxies-daniel-pomarede/#respond Wed, 22 Sep 2021 19:47:57 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=2437 Quelle est notre position dans l’Univers ? C’est plutôt simple, me direz-vous : la Terre orbite autour du Soleil avec un cortège de 7 autres planètes, et ce Système solaire se trouve dans la Voie Lactée, une galaxie qui comporte plusieurs centaines de milliards d’autres étoiles. Mais au-delà ? Andromède, oui, mais encore au-delà ? Grâce à la cosmographie, […]

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Quelle est notre position dans l’Univers ? C’est plutôt simple, me direz-vous : la Terre orbite autour du Soleil avec un cortège de 7 autres planètes, et ce Système solaire se trouve dans la Voie Lactée, une galaxie qui comporte plusieurs centaines de milliards d’autres étoiles. Mais au-delà ? Andromède, oui, mais encore au-delà ? Grâce à la cosmographie, l’homme est désormais capable de cartographier en 3 dimensions la position des galaxies qui nous entourent, découvrant ainsi de véritables continents de galaxies, appelés des superamas.

Nous allons aujourd’hui voyager très loin dans l’infiniment grand, à la découverte de l’une des plus grandes structures connues de l’Univers, Laniakea, découverte en 2014. Nous avons rendez-vous avec Daniel Pomarède…

Pour télécharger cet épisode au format mp3, cliquez ici.
Et n’hésitez pas à vous abonner sur iTunes et nous laisser une note ou un commentaire !

Quelques liens pour poursuivre le voyage :

  • La vidéo de Laniakea publié en 2014 par le site Nature
  • Une conférence d’Hélène Courtois, codécouvreur de Laniakea
  • Un épisode de La Méthode scientifique où Daniel Pomarède parle des vides cosmiques !

Crédits audio :
Home – Hold
Zbigniew Preisner – Lacrimosa (Requiem for my friend)

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Oumuamua, l’hypothèse extraterrestre /2021/01/31/oumuamua-lhypothese-extraterrestre/ /2021/01/31/oumuamua-lhypothese-extraterrestre/#respond Sun, 31 Jan 2021 10:17:33 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=2308 Depuis quelques semaines, le visiteur interstellaire Oumuamua fait à nouveau parler de lui, après la publication d’un livre revenant sur une hypothèse controversée, expliquant que l’objet mystérieux serait de nature artificielle. Aurions-nous manqué en 2017 un rendez-vous avec la sonde d’une civilisation extraterrestre ? Revue de presque Dans son habituelle revue de presse matinale sur France […]

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Depuis quelques semaines, le visiteur interstellaire Oumuamua fait à nouveau parler de lui, après la publication d’un livre revenant sur une hypothèse controversée, expliquant que l’objet mystérieux serait de nature artificielle. Aurions-nous manqué en 2017 un rendez-vous avec la sonde d’une civilisation extraterrestre ?

Revue de presque

Dans son habituelle revue de presse matinale sur France Inter, le journaliste Claude Askolovitch rapporte la publication d’un article de Télérama, au sujet du livre Le Premier Signe d’une vie intelligente extraterrestre, d’Avi Loeb. Paru le jeudi 28 janvier en sortie mondiale, ce qui est plutôt inhabituel pour un essai scientifique, ce livre traite d’Oumuamua. Si ce nom ne vous dit rien, rappelons qu’il s’agit du premier objet interstellaire détecté dans notre Système solaire, fin 2017. Sa forme plutôt inhabituelle, sa trajectoire et sa vitesse font débat dans la communauté scientifique, et plusieurs hypothèses sont actuellement discutées pour tenter de définir l’origine et la nature de cet objet. Astéroïde ? Comète ? Ou autre chose ?

Claude Askolovitch explique :

Un homme nous dit que cet éclaireur prouve que nous ne sommes pas seuls. Oumuamua aurait été une balise d’observation envoyée il y a des millions d’années par une civilisation disparue.

Avi Loeb (crédits : Herlinde Koebl / Focus / Cosmos)

Conscient d’aborder un sujet délicat qui aux oreilles de bien des auditeurs de France Inter pourrait sembler farfelu ou se rapprocher de la science-fiction plus que de la science, il précise qu’Avi Loeb est un « grand astrophysicien » et emploie plusieurs fois le terme de « sérieux », au sujet de l’université dans laquelle il travaille (Harvard), de la maison d’édition qui publie la version française dudit livre (le Seuil), ou des articles déjà publiés à son sujet dans la presse américaine.

Racontant ensuite comment Loeb se souvient que Galilée dut faire face à l’opposition de ses pairs qui refusaient même de regarder à travers sa lunette lorsqu’il expliquait que la Terre tournait autour du Soleil, il pose une question audacieuse :

Avi Loeb ne dit pas qu’il est Galilée, mais nous, pensons-nous qu’il l’est ?

S’il est toujours agréable d’entendre parler de questions cosmologiques fondamentales dès le matin en lieu et place des éternelles angoisses liées à la crise sanitaire et économique, en revanche la chronique de Claude Askolovitch est imprécise, voire incorrecte, laissant croire que l’hypothèse de Loeb est finalement la plus crédible, qu’il est une sorte de génie précurseur, à qui l’histoire donnera finalement raison. Après tout, pourquoi pas ? En grands rêveurs, c’est tout ce qu’on lui souhaite. Et, comme le précise le bandeau rouge apposé sur la couverture du livre, s’il a raison, alors il s’agira de la plus grande découverte de l’histoire de l’humanité.

La chronique d’Askolovitch rappelle que rares sont les journalistes à disposer d’une véritable culture scientifique. Askolovitch voit sans doute Loeb comme une sorte de lanceur d’alerte, ou comme un génie injustement incompris. Mais ces génies universels incontestés qui viennent bouleverser seuls le domaine qu’ils étudient, le faisant progresser subitement et incontestablement, n’existent pas. Einstein ou Newton eux-mêmes, tout génies qu’ils soient, s’appuyaient sur les travaux de leurs prédécesseurs et de leurs pairs pour affiner leurs théories. Il faut plutôt voir les scientifiques, comme l’explique la formule consacrée du philosophe Bernard de Chartres, comme des nains qui se haussent sur les épaules des géants qui les ont précédés, leur permettant ainsi de voir plus loin. Bernard de Chartres, en parlant de géants, faisaient références aux savants de l’Antiquité, dont le savoir était jugé immense, on pourrait aujourd’hui parler de nains qui se haussent sur les épaules d’autres nains…

Oumuamua (vue d’artiste).

Par ailleurs, la science se base sur des faits, et non des opinions. La science n’est pas non plus démocratique : personne, et surtout pas le peuple, ne vote pour déterminer quelle hypothèse est la plus raisonnable et fera office de vérité. Une proposition scientifique sérieuse a été validée par les pairs du chercheur qui l’a formulée, a été publiée dans une revue scientifique à comité de lecture rigoureuse et dont l’impact est mesurable, est réutilisée et confirmée par d’autres pairs et, dans la mesure du possible, a été vérifiée par l’expérience.

Alors, Avi Loeb est tout à fait libre d’émettre une telle hypothèse, qui permet à cette affaire de percer dans les médias généralistes, et sans doute aussi de faire parler de son livre à peu de frais. Mais il faut rappeler qu’il est à peu près le seul à émettre cette hypothèse, pour la simple et bonne raison qu’elle est très peu crédible, au regard de ce que nous savons sur Oumuamua.

Très vite, quand un phénomène cosmique inédit est détecté, l’hypothèse E.T. fait son apparition. C’était déjà le cas en 1967, après la découverte du tout premier pulsar, baptisé LGM-1, pour Little Green Men (soit « Les petits hommes verts »)… Idem en ce qui concerne KIC 8462852, étoile dont les inhabituelles fluctuations de luminosité ont amené certains chercheurs à évoquer la présence d’une superstructure extraterrestre chargée de collecter son énergie… Rappelons-nous aussi de l’annonce controversée de la détection de phosphine dans l’atmosphère de Vénus ou de méthane sur Mars… Et j’en oublie certainement.

Quels secrets cachent les nuages de Vénus ?

La vie extraterrestre est un sujet fascinant, presque inévitable sur un site consacré à la cosmologie, et Dans la Lune n’hésite d’ailleurs pas à évoquer ces hypothèses à la frontière entre la science et la science-fiction, parce qu’il n’est pas interdit de rêver… Mais un rêver un temps n’empêche pas d’être sérieux et rigoureux, ce qui devrait être la qualité première des journalistes, à commencer par ceux du service public.

 Bon, pourquoi c’est pas E.T. alors ?

Quels éléments concrets amènent Avi Loeb à pencher pour cette hypothèse ? Certaines des caractéristiques certes particulières d’Oumuamua :

  • Sa forme plate et allongée, comme un cigare
  • La façon dont il s’est mis à accélérer en quittant notre voisinage cosmique

Ce comportement particulier pourrait s’expliquer si Oumuamua était une comète qui avait libéré du gaz en s’éloignant, mais aucun phénomène de dégazage n’a été observé, pas plus que n’ont été identifiés les autres attributs traditionnels des comètes, à commencer par leur queue. Oumuamua, clairement, est inhabituel.

Ce sont ces éléments qui ont mené Avi Loeb à la conclusion qu’Oumuamua serait un objet de nature artificielle, comme il l’écrit dans l’introduction de son livre :

Je soutiens que l’explication la plus simple de ces particularités est que l’objet a été créé par une civilisation intelligente qui n’est pas de cette Terre.

Ce qui amuse aussi, c’est que cet étrange visiteur interstellaire rappelle un peu le fameux roman Rendez-vous avec Rama, d’Arthur C. Clarke, paru en 1973, dans lequel un vaisseau interstellaire cylindrique pénètre dans le Système solaire. Ne dites pas à Loeb que son hypothèse a été inspirée par ce roman, puisqu’il ne porte pas la science-fiction dans son cœur, comme il l’explique dans un entretien paru sur le site Observer :

Je n’aime pas la science-fiction car elle enfreint souvent les lois de la physique et me paraît ridicule.

Rama est une sorte de cylindre O’Neill, ces superstructures imaginées dans les années 70.

Dès fin 2018, il publie un article suggérant qu’Oumuamua pourrait être un vaisseau doté d’une voile solaire, envoyé intentionnellement à proximité de la Terre. Il précise à l’époque que ce scénario est « exotique ».

Dans son livre, Loeb explique adopter cette hypothèse car il craint que nous puissions passer à côté de cette possibilité d’avoir découvert la vie extraterrestre. Au vu de l’engouement sur le sujet, au vu des annonces récurrentes évoquées plus haute et de tant d’autre, et puisque la réponse à la question de savoir si nous sommes seuls dans l’Univers est l’une des plus grandes quêtes de l’humanité, si un scientifique découvrait le moindre indice en faveur de l’existence d’une civilisation extraterrestre, il le ferait immédiatement savoir. Les annonces récurrentes évoquées plus haut, et tant d’autres (le signal Wow!, la météorite ALH 84001, etc.) le montrent aisément.

En sciences, le rasoir d’Ockham, ce principe qui veut que les hypothèses les plus simples doivent être privilégiées, est souvent invoqué. Pour Loeb, les hypothèses naturelles ne sont pas suffisantes, et l’hypothèse artificielle doit donc être privilégiée. Il explique que la communauté scientifique est si effrayée à l’idée de se tromper, qu’elle n’ose plus se confronter à l’inconnu.

Pourtant, l’hypothèse extraterrestre est bien sur la table. Elle a été évoquée, testée, dans la mesure du possible : l’institut SETI a ainsi écouté Oumuamua durant un mois, cherchant en vain d’éventuels signaux radio. Elle est parfois évoquée par d’autres scientifiques, mais une comme une hypothèse extrême, qui nécessite pour être prise au sérieux de se débarrasser d’abord de toutes les hypothèses naturelles qui, contrairement à ce qu’affirme Loeb, restent pour l’instant plus crédibles.

Dès juillet 2019, un article revenait sur la controverse, et expliquait pourquoi Oumuamua était très vraisemblablement un objet d’origine naturelle.

Il se concluait ainsi :

Même si Oumuamua soulève un certain nombre de questions fascinantes, nous avons montré que chacune peut être répondue en supposant qu’il soit un objet naturel. Affirmer que Oumuamua puisse être artificiel n’est pas justifié lorsque l’on considère le vaste corpus de connaissances actuelles sur les corps mineurs du système solaire et la formation planétaire.

Depuis, de nombreux papiers ont été publiés sur le sujet. Selon les dernières études en date, Oumuamua serait le fragment d’un corps cométaire.

Avi Loeb est un peu seul, c’est vrai. Et plus la communauté scientifique semble vouloir lui donner tort, plus il s’acharne. Libre à lui, évidemment, d’aller à rebours du consensus, mais ce n’est peut-être pas la chose la plus raisonnable à faire, à l’heure ou les fake news pullulent, où l’idéologie prime trop souvent sur la recherche scientifique, et où la vérité semble être finalement une opinion comme un autre.

Oumuamua, observé ici par le télescope William Herschel, est ce petit point au centre de l’image. (crédits : A Fitzsimmons, Queen’s University Belfast/Isaac Newton Group, La Palma)

Un article de Libération résume finalement assez bien toute cette affaire :

Deux cent soixante pages plus tard, le sujet n’est plus de savoir si notre système solaire a été visité ou non par un objet artificiel conçu par des créatures pensantes orbitant autour d’une autre étoile, mais de comprendre comment certains esprits brillants sont capables de rationaliser à outrance une lubie très personnelle.

Là où Loeb rejoint la communauté scientifique, c’est lorsqu’il explique que les prochains visiteurs interstellaires seront mieux identifiés, mieux étudiés, parce que nous disposerons de technologies plus avancées, comme par exemple le télescope LSST (Large Synoptic Survey Telescope) ou  l’observatoire Vera-C.-Rubin, qui selon Loeb serait capable de détecter un Oumuamua par mois. Nous découvrirons alors peut-être que ce tout premier visiteur venu d’ailleurs n’était pas si singulier que ça, tout compte fait.

Quoi de mieux pour terminer un article que de citer le grand Carl Sagan ? Allez Carl, c’est parti :

Des affirmations extraordinaires nécessitent des preuves extraordinaires.

Et des preuves extraordinaires en faveur de l’existence de la vie extraterrestre, il n’y en a pas. Pas encore ?

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Arecibo – Un phare dans la nuit cosmique /2020/11/26/arecibo-un-phare-dans-la-nuit-cosmique/ /2020/11/26/arecibo-un-phare-dans-la-nuit-cosmique/#respond Thu, 26 Nov 2020 16:21:57 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=2249 L’année 2020 s’achève donc par une bien triste nouvelle astronomique : le radiotélescope d’Arecibo sera démantelé suite aux deux incidents survenus récemment. Retour sur un symbole à l’héritage scientifique immense, qui aura vécu plus d’un demi-siècle. Le télescope de tous les records Les origines du télescope d’Arecibo remontent aux années 50 et aux travaux de William […]

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L’année 2020 s’achève donc par une bien triste nouvelle astronomique : le radiotélescope d’Arecibo sera démantelé suite aux deux incidents survenus récemment. Retour sur un symbole à l’héritage scientifique immense, qui aura vécu plus d’un demi-siècle.

Le télescope de tous les records

Les origines du télescope d’Arecibo remontent aux années 50 et aux travaux de William Gordon (1918 – 2010), professeur en génie électrique à l’Université de Cornell (Etats-Unis). Gordon souhaite disposer d’un instrument pour étudier l’ionosphère, la couche supérieure de l’atmosphère terrestre, au-delà de 60 km d’altitude. Pour cela, il prévoit d’y envoyer des signaux radio. Ce sont ses calculs qui permettront de mettre au point ce qui deviendra le futur télescope d’Arecibo.

Arecibo est une petite ville de Porto Rico, une île qui appartient au territoire des Etats-Unis mais n’est pas considérée comme un état de l’Union. Concrètement, le président des Etats-Unis en est bien le chef, la constitution américaine y est appliquée, mais Porto Rico ne possède aucun député ou sénateur américain. Ce statut n’est pas sans créer quelques tensions, une manifestation a même eu lieue sur le site du radiotélescope en 1999, pour contester la présence américaine plus que celle du radiotélescope lui-même.

Pourquoi avoir choisi un tel lieu ? Parce que l’île est située près de l’équateur, ce qui facilite les observations des planètes du Système solaire, parce que le relief naturel fournit une cuvette idéale pour l’installation de la coupole, et que le site est protégé des interférences électromagnétiques des grandes métropoles.

Il faudra seulement trois ans de travaux pour construire ce télescope aux dimensions titanesques pour l’époque. La coupole, d’un diamètre de 305 mètres, est composée de plus de 38 000 panneaux d’aluminium, surplombés à 150 mètres de hauteur par une plate-forme de 820 tonnes comprenant divers instruments scientifiques, et soutenue par 18 câbles reliés à trois tours en béton armé. Du solide. D’ailleurs, il gardera le record du plus grand radiotélescope du monde pendant 53 ans (il sera détrôné par le radiotélescope chinois FAST) !

Le radiotélescope chinois FAST.

E.T. Téléphone maison

Si le radiotélescope d’Arecibo est aussi connu après du grand public, c’est en partie grâce au programme SETI (Search for Extraterrestrial Intelligence), qui utilisait les données issues du télescope pour y rechercher la trace éventuel d’un signal issu d’une civilisation extraterrestre. Le temps d’observation consacré à ce programme était pourtant négligeable par rapport aux autres domaines d’étude d’Arecibo, mais un tel sujet d’étude est forcément plus médiatique.

Dans un article publié en 2001 dans le magazine Ciel & Espace, Daniel Altschuler, alors responsable de la communication du site, explique :

Seti crée l’événement à l’observatoire. Son équipe se charge pour ainsi dire de notre communication. Le reste du temps, c’est plutôt calme.

Bon, l’historique du radiotélescope avec les extraterrestres ne s’arrête pas au programme SETI. En 1974, il est utilisé pour envoyer le désormais célèbre message d’Arecibo dans l’espace. Il s’agit d’un court message radio destiné à une éventuelle civilisation extraterrestre, envoyé vers l’amas globulaire M13, situé à près de 22 000 années-lumière de la Terre. Le dit-message, écrit notamment par Frank Drake et Carl Sagan, a été rédigé de manière à pouvoir être aisément décrypté. En 1679 bits, il affiche des rudiments de mathématique, de physique et de biologie, puis présente l’homme et sa place dans le Système solaire. Une représentation figurée du télescope d’Arecibo conclut même le message ! Il faudra s’armer de patience avant de recevoir une éventuelle réponse : le message mettra plus de 22 000 ans pour parvenir à sa destination…

Le message d’Arecibo. C’est pas sexy, hein ?

Arecibo doit également sa popularité à ses apparitions dans des œuvres culturelles populaires des années 90. Il apparaît ainsi dans le roman Contact de Carl Sagan, ainsi que dans l’adaptation cinématographique qui en a été tirée, réalisée par Robert Zemeckis (1997). Deux ans plus tôt, il apparaissait dans les films La Mutante (de Roger Donaldson) et surtout dans Goldeneye (réalisé par Martin Campbell), où il sert de lieu pour l’affrontement final entre James Bond et le grand méchant du film ! L’histoire du film présente le radiotélescope comme une gigantesque antenne chargée de contrôler des satellites de l’armée Russe…

Le radiotélescope fera également une courte apparition dans l’introduction du premier épisode de la seconde saison de X-Files, épisode qui porte le nom évocateur de « Les Petits Hommes verts » !

Au-delà du programme SETI, ce sont ces multiples apparitions qui contribueront à lui donner auprès du grand public, à tort, l’image d’un outil destiné à la recherche d’une vie extraterrestre. Sans produire d’images spectaculaires, comme par exemple le télescope spatial Hubble, Arecibo est parvenu à rentrer dans l’imaginaire collectif.

Faits d’armes

Mercure vue par la sonde Messenger.
(crédits : NASA / JHU Applied Physics Lab / Carnegie Inst. Washington)

Bien qu’il n’ait pas détecté de signal de petits hommes verts, le bilan scientifique du radiotélescope est pourtant remarquable à bien des égards. En 1967, il permet de mesurer précisément la durée d’une année sur Mercure : 59 jours, au lieu de 88, comme on le croyait alors. En 1974, il permet la détection d’un pulsar binaire (un couple d’étoiles en orbite l’une autour de l’autre, et dont l’une des étoiles est un pulsar), ouvrant la voie à la détection des ondes gravitationnelles, ces courbures de l’espace-temps prédites par Einstein et dont l’existence ne sera confirmée qu’en 2015. Pour cette découverte, Russell A. Hulse et Joseph H. Taylor Jr. recevront le prix Nobel de physique en 1993. En 1981, Arecibo fournira la première carte radar de la planète Vénus. En 1992, il permettra aux scientifiques Dale Frail et Aleksander Wolszczan de découvrir les deux premières exoplanètes orbitant autour d’un pulsar (une étoile à neutrons en rotation rapide). Beaucoup plus récemment, en 2014, le vénérable radiotélescope identifie pour la première fois un sursaut rapide récurrent. Si les sursauts rapides, ces signaux radio dont on peine à expliquer l’origine, sont connus depuis 2007, en revanche leur répétition n’avait jamais été enregistrée auparavant.

Cette liste est évidemment très loin d’être exhaustive. De par son âge, de par sa localisation géographique, de par son étonnant concept, de par ses apports à la science, Arecibo était un véritable monument, une institution. De nombreux scientifiques se sont émus de sa fin annoncée. D’autant plus que malgré son impressionnante longévité, Arecibo était bien loin d’être démodé. D’abord parce qu’il a été régulièrement amélioré, notamment en 1973, 1997 et 2004. S’il ne détenait plus le record du plus grand radiotélescope du monde, il gardait en revanche des particularités qui en faisaient un outil unique, grâce notamment à son radar et aux larges bandes de fréquence qu’il était en mesure de couvrir.

En février 2019, les équipes gérantes de l’Observatoire organisaient même un atelier de trois jours intitulé « Les voies vers le futur de l’observatoire d’Arecibo », élaborant quelques suggestions de futures améliorations techniques.

Un rapport publié après l’événement précisait :

La prochaine génération de mises à niveau du télescope Arecibo est essentielle pour maintenir cette installation nationale à la pointe de la recherche en radioastronomie, tout en maintenant son leadership dans les études radar des astéroïdes, planètes et satellites géocroiseurs.

Coût, premiers problèmes

Le radiotélescope, qui avait déjà du faire face à des problèmes financiers dans les années 2000 (un rapport de la NSF s’en inquiétait en 2006), a été touché en 2017 par l’ouragan Maria. Une antenne de 29 mètres de long était alors tombée, perforant certains des panneaux ornant la surface parabolique. Un problème sérieux, mais qui n’avait pas inquiété outre mesure les équipes présentes sur place. La survie du télescope n’était pas en jeu.

Le problème qui est survenu le 10 août dernier est en revanche bien plus grave. Un des câbles utilisés pour maintenir la plate-forme métallique en suspension au-dessus de la surface parabolique est sorti de son support. Résultat, l’un des dômes suspendus a été lacéré, la plate-forme métallique a été tordue, et à nouveau, des panneaux de la surface ont été abîmés.

Les dégâts sur le télescope, suite à la rupture du premier câble.
(crédits : University of Central Florida)

Comme précisé à l’époque dans un article publié sur le site Libération, les conséquences sont inquiétantes :

La surface de collecte est seulement un problème parmi d’autres. L’observatoire d’Arecibo est conçu pour pointer des positions dans le ciel à un millième de degré près. La précision de pointage repose sur l’équilibrage d’une plateforme massive, suspendue avec… des câbles.

Les financements manquent, et la National Science Foundation (NSF), qui gère le site, annonce qu’elle recherche de nouveaux investisseurs. Nul ne sait alors combien coûteront les travaux, qui les paiera, et combien de temps cela prendra…

Le destin, de toute façon, en décidera autrement, puisque le 6 novembre, un second câble lâche. Cette fois, il se rompt, en entraîne de nouveaux dégâts. A priori, la charge supplémentaire entraînée par la rupture du premier câble sur les autres câbles est responsable de ce nouvel accident.

La nouvelle tombe finalement le 20 novembre : le radiotélescope sera démantelé.

Un communiqué de presse de la NSF précise :

La décision intervient après que la NSF ait réalisé plusieurs évaluations par des sociétés d’ingénierie indépendantes, qui ont constaté que la structure du télescope était en danger de défaillance catastrophique, et que ses câbles pourraient ne plus être capables de supporter les charges pour lesquelles ils étaient conçus. De plus, plusieurs évaluations ont indiqué que toute tentative de réparation pouvait mettre les travailleurs en danger de mort. Même en cas de réparations à venir, les ingénieurs ont constaté que la structure présenterait probablement des problèmes de stabilité à long terme.

Et maintenant ?

C’est une immense perte pour la science en général, évidemment, et pour l’astrophysique en particulier. Le colosse des Caraïbes aura réussi à faire rêver la communauté scientifique et les amateurs de science-fiction. Immense, exotique, un peu abîmé par le temps, il symbolisait à merveille cette incroyable fascination qui pousse l’homme à tenter de comprendre le monde qui l’entoure.

Faut-il s’émouvoir de cette perte ? Oui. Mais les données qu’il a pu récolter à travers les décennies n’ont pas encore fini d’être étudiées. Arecibo vivra encore à travers elles, à travers toutes les découvertes qu’il a pu engendrer, et à travers toutes les vocations qu’il a pu susciter… Le Roi est mort, vive le Roi !

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Voir l’invisible – le trou noir /2019/04/15/voir-linvisible-le-trou-noir/ /2019/04/15/voir-linvisible-le-trou-noir/#respond Mon, 15 Apr 2019 16:19:15 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=1987 Ce qui semblait impossible ne l’est plus : l’homme est parvenu à voir l’invisible en photographiant l’environnement proche d’un trou noir. L’occasion de méditer sur l’infini, sur les prouesses de l’ingénierie humaine, et sur les mystères qui nous entourent encore. Car même s’il se dévoile un peu, le trou noir reste le gardien de bien […]

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Ce qui semblait impossible ne l’est plus : l’homme est parvenu à voir l’invisible en photographiant l’environnement proche d’un trou noir. L’occasion de méditer sur l’infini, sur les prouesses de l’ingénierie humaine, et sur les mystères qui nous entourent encore. Car même s’il se dévoile un peu, le trou noir reste le gardien de bien des mystères…

 Une image historique

C’est une modeste photo de quelques pixels de couleur noir et orange. Il en va ainsi de la cosmologie : à mesure que l’on s’éloigne de la Terre, il faut apprendre à se contenter de peu. De majestueuses étoiles se transforment en petits points blancs ou rouges. D’immenses galaxies composées de centaines de milliards d’étoiles deviennent de petites taches floues, aux contours mal définis. Mais ce peu, en image, veut pourtant dire beaucoup, en concept.

Car c’est un monstre fascinant qui se dévoile enfin. Le trou noir, un objet cosmique à l’attraction gravitationnelle si intense que rien ne peut s’en échapper, pas même la lumière. En l’occurrence celui qui niche au centre de la galaxie M87. Situé à 55 millions d’années-lumière de la Terre, sa masse est de près de 6,5 milliards de fois celle de notre Soleil !

Pensons-y un instant : pour obtenir cette photo, il aura fallu récolter en une nuit plus de données que pour aucun autre projet scientifique, tous domaines confondus, comme le rappelait l’astrophysicien Jean-Pierre Luminet dans un article du magazine La Recherche en 2018 :

Une seule nuit d’observation collectait 2 petabytes de données, soit autant qu’une année entière d’expériences au LHC, le grand collisionneur du CERN qui a permis en 2012 la découverte du boson de Higgs-Englert après analyse de 4 millions de milliards de collisions proton-proton…

Le traitement de cette quantité monstrueuse de données aura pris du temps, beaucoup de temps, bien plus que ce qui était prévu initialement, pour finalement obtenir cela : la première image d’un trou noir entouré de son disque d’accrétion. Il ne s’agit pas d’une découverte : des simulations numériques présentaient déjà un résultat similaire depuis plusieurs décennies, avec une qualité d’image évidemment supérieure.

C’est l’astrophysicien Jean-Pierre Luminet qui proposa la première simulation numérique d’un trou noir, en 1979.

Le chemin vers d’autres mystères

Il ne s’agit pas non plus d’une surprise : le résultat est en tout point conforme à ce qui était attendu. Il s’agit en réalité d’une confirmation expérimentale de plus de la théorie de la Relativité d’Einstein, décidément jamais mise en défaut. Lui, pourtant, ne croyait pas à l’existence des trous noirs, qui n’ont longtemps été considérés que comme de simples artefacts théoriques. Dès la fin du  XVIIIe siècle, le révérend John Michell et le physicien Pierre-Simon de Laplace évoquaient des astres si denses qu’aucune lumière ne pourrait s’en échapper, et qui seraient dès lors invisibles. Mais il faudra attendre les années 1960 pour que la recherche s’empare sérieusement du sujet avec les travaux de Roy Kerr, John Wheeler ou encore Stephen Hawking. Dès lors, les trous noirs entrent dans l’imaginaire collectif, essaimant dans la science-fiction avec plus ou moins de réalisme. En 2015, les laboratoires Ligo et Virgo permettent la détection de trous noirs au travers des ondes gravitationnelles émises par leur coalescence, à 1,3 milliard d’années-lumière de la Terre.

Gargantua, le trou noir du film Interstellar, de Christopher Nolan (2014).

Cette image est aussi une preuve supplémentaire de la beauté des équations, qui permettent d’explorer l’Univers en pensée avec bien plus de précision que le plus puissant des télescopes. Les trous noirs sont nés en concept dans l’esprit de l’homme plus de deux siècles avant d’être véritablement observés, à une époque où personne n’avait la preuve que des planètes tournaient autour d’autres étoiles que notre Soleil, et que l’Univers comportait d’autres galaxies au-delà de notre Voie Lactée.

A ce titre l’astrophysicien Aurélien Barrau, dans une interview donnée à Paris Match, précise :

Pour beaucoup de choses, les équations contiennent énormément plus d’informations que les photos. Et donc je préfère, de loin, connaître la structure de l’espace-temps autour d’un trou noir, que de voir une image de trou noir.

Voilà, le trou noir dispose désormais d’un visage. Ce visage est le symbole du génie humain, capable de grandes prouesses pour observer et comprendre l’environnement dans lequel il vit et meurt. Mais ce visage dévoile aussi nos faiblesses. Car il est en réalité un masque qui dissimule le plus grand secret de la physique. A l’intérieur d’un trou noir, la matière est concentrée dans une région d’une taille infinitésimale, 10 millions de milliards de milliards de fois inférieure à celle de l’atome, appelée singularité. A ce stade notre physique actuelle, basée sur la Relativité générale et la Mécanique quantique, deux théories incompatibles entre elles et qui sont pourtant toutes les deux convoquées à l’int��rieur d’un trou noir, est incapable de prévoir ce qu’il advient. Seule une théorie de la gravité quantique permettrait de les unifier, comme la théorie des cordes ou la gravité quantique à boucles. Nous pourrions alors nous aventurer au-delà de cette singularité, contempler l’infini et, peut-être, soulever d’autres questions plus vertigineuses encore…

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Une anomalie dans le rayonnement fossile /2018/12/03/une-anomalie-dans-le-rayonnement-fossile/ /2018/12/03/une-anomalie-dans-le-rayonnement-fossile/#respond Mon, 03 Dec 2018 19:19:22 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=1879 La toute première lumière émise par l’Univers est riche d’enseignements sur son origine et son évolution à travers l’espace et le temps. Et certains des mystères qu’elle renferme résistent encore aux modèles cosmologiques actuels, laissant la place aux hypothèses les plus audacieuses… Et la lumière fut En 1964, Robert Wilson et Arno Penzias, chercheurs pour […]

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La toute première lumière émise par l’Univers est riche d’enseignements sur son origine et son évolution à travers l’espace et le temps. Et certains des mystères qu’elle renferme résistent encore aux modèles cosmologiques actuels, laissant la place aux hypothèses les plus audacieuses…

Et la lumière fut

En 1964, Robert Wilson et Arno Penzias, chercheurs pour l’entreprise de télécommunications canadienne Bell, sont chargés de détecter et supprimer les bruits parasites qui interfèrent avec les satellites de communication (tels que ceux des radars ou de la radiodiffusion, par exemple). Ils détectent bientôt un bruit faible, uniforme dans le ciel, présent jour et nuit. Ils vérifient leurs instruments, les nettoient – pensant que le bruit est dû à des fientes d’oiseaux – mais rien n’y fait. Le bruit est toujours là. Ils en concluent qu’il provient probablement de l’extérieur de notre galaxie, la Voie Lactée.

Wilson et Penzias ne se doutent pas encore que la solution à leur mystérieux bruit se trouve à seulement quelques centaines de kilomètres des laboratoires de Bell. Une équipe de chercheurs de l’université de Princeton, menée par le physicien Robert Dicke, cherche à traquer le rayonnement fossile. Il s’agit ni plus ni moins que de la première lumière de l’Univers, prédite dès les années 40 par l’astrophysicien George Gamow. Celle-là même qui a été détectée par Wilson et Penzias, sans le savoir ! C’est le professeur Bernard F. Burke du MIT (Massachusetts Institute of Technology) qui mettra la puce à l’oreille de Penzias, en évoquant avec lui ce fameux rayonnement fossile et les travaux de Robert Dicke.

Il en va des découvertes scientifiques comme de la vie : parfois, c’est le hasard qui gagne. Robert Dicke et son équipe passent à côté d’une découverte majeure, peut-être à quelques mois près, au profit de Wilson et Penzias, qui ont trouvé ce qu’ils ne cherchaient pas, et remportent ainsi le prix Nobel en 1978.

Arno Penzias et Robert Wilson.

La rumeur

Mais alors c’est quoi au juste, ce rayonnement fossile ? C’est tout simplement la première lumière de l’Univers qui soit parvenue jusqu’à nos yeux.L’Univers primordial, durant cette phase appelée le Big Bang, se trouve dans un état extrêmement dense et extrêmement chaud. Les photons sont perpétuellement en interaction avec la matière. Ils ne voyagent pas. L’Univers est une sorte de brouillard. Mais plus il s’étend, et plus il refroidit. 380 000 ans environ après le Big Bang, il s’est suffisamment refroidi pour que se forment les atomes d’hydrogène. Les photons n’interagissant plus avec eux, ils voyagent librement dans l’espace, jusqu’à parvenir aux instruments développés par l’homme, plus de 13 milliards d’années plus tard.

Dans son Dictionnaire amoureux du Ciel et des Etoiles, l’astrophysicien Trinh Xuan Thuan conclut :

La carte du rayonnement fossile est donc la plus vieille image que nous puissions obtenir de l’univers : elle nous permet de le contempler lorsqu’il était encore dans la prime jeunesse de ses 380 000 ans.

Depuis, l’Univers s’est étendu dans l’espace – de près de mille fois, et refroidi – de près de mille fois également. La température de ce rayonnement fossile est donc très froide : trois degrés au-dessus du zéro absolu (environ 2,72 degrés kelvin).

Le rayonnement fossile se comprend dans le contexte de l’expansion de l’Univers.

Photographier l’instant primordial

Le bruit détecté, il ne restait dès lors plus qu’à le photographier pour obtenir une image merveilleuse de notre Univers adolescent. Il faudra près de vingt-cinq ans pour parvenir à ce résultat, lorsque la NASA envoie dans l’espace un satellite appelé COBE (pour Cosmic Background Explorer ou explorateur du fond diffus cosmologique en français), équipé d’un radiotélescope micro-onde capable de détecter et de mesurer les différences de température du fond diffus cosmologique. Nous sommes alors en 1992, et l’humanité découvre une photographie de l’Univers lorsqu’il n’avait que près de 380 000 ans.

Comme le rappelle Max Tegmark dans son livre Notre Univers Mathématique, le physicien britannique Stephen Hawking annonce à ce sujet qu’il s’agit de :

La découverte la plus importante du siècle, si ce n’est depuis toujours.

COBE révèle également de petites fluctuations de densité de l’univers primordial : la matière n’était alors pas répartie uniformément dans l’Univers. C’est d’ailleurs toujours le cas, ce phénomène s’est même accru avec l’action de la gravité, expliquant la répartition actuelle des galaxies qui se concentrent sur de grandes zones, sous forme de filaments. Ces fluctuations de densité se traduisent dans le fond diffus cosmologiques par des fluctuations de température, aussi appelées anisotropies. Elles sont extrêmement difficiles à repérer, leur amplitude étant de l’ordre du cent-millième de degré !

En 2001, le successeur de COBE, WMAP (pour Wilkinson Microwave Anisotropy Probe) est lancé. Bien plus sensible, bien plus précis, il recense avec une grande précision les infimes fluctuations de température du rayonnement fossile. Il met en évidence ce qui sera bientôt appelé le Point froid (Cold spot) : une région du ciel dans laquelle la température est anormalement froide. Une anomalie, au regard des propriétés du rayonnement fossile. Un endroit qui n’a pas lieu d’être. Un mystère.

La carte du rayonnement fossile livrée en 2013 par le satellite Planck de l’Agence spatiale européenne (ESA), encore plus précise et détaillée, confirment cette anomalie, ce petit grand de sable dans les rouages de nos lois cosmologiques…

Chaque mission affine un peu plus notre regard.
(crédits : Le Figaro)

Vers le multivers

Plusieurs hypothèses ont été proposées pour expliquer ce curieux Point froid :

  • L’influence de l’énergie noire, qui expliquerait bien les zones vides de l’Univers, mais pas d’une taille comme celle du Point froid, dont la probabilité de formation serait dans ce cas très faible
  • La présence d’un gigantesque trou noir, super-super massif,qui aurait absorbé les millions de galaxies qui l’entourent
  • Le point froid serait une sorte de supervide, non pas totalement vide mais avec une densité très faible de galaxies – notez que cela n’explique pas la formation du Point froid

Une hypothèse bien plus controversée, et absolument vertigineuse, est évoquée en 2017 dans un papier du chercheur britannique Ruari Mackenzie, intitulé Evidence against a supervoid causing the CMB Cold Spot (soit en français : preuves qui infirment l’hypothèse d’un supervide qui causerait le point froid du rayonnement fossile). Le Point froid serait la cicatrice laissée sur notre Univers d’une collision avec un autre univers, survenue il y a près de 13 milliards d’années. Deux univers entrant en collision à la manière de deux bulles – soit rien de moins, si cette hypothèse était avérée, qu’une preuve de l’existence du multivers, qui voudrait qu’une infinité d’univers parallèles coexistent !

Vision d’artiste du multivers.
(crédits : Jaime Salcido / EAGLE Collaboration)

En vérité, dès 2007, la physicienne albano-américaine Laura Mersini-Houghton, spécialiste de la théorie du multivers, affirmait déjà que le supervide était :

L’incontestable empreinte d’un autre univers au-delà des frontières du nôtre.

Le fameux multivers… Au-delà de tous nos horizons cosmologiques, à jamais inaccessible, il est abondamment cité dans la science-fiction, et divise énormément la communauté scientifique. Une des critiques récurrentes concerne l’impossibilité de prouver une telle théorie. Si elle ne reste à jamais qu’un fantasme de rêveurs, et même si elle répond à des problématiques cosmologiques, est-elle véritablement scientifique ?

Dans un article au titre audacieux, Peut-on tester les univers parallèles ?, l’astrophysicien Aurélien Barrau écrit :

Peut-être ces univers multiples n’existent-ils pas et constituent-ils une impasse épistémologique ? Mais il serait regrettable de les balayer d’un revers de la main. D’abord parce qu’ils sont prédits par certaines de nos théories (en ce sens, ils ne sont pas une hypothèse mais une conséquence) et qu’il serait incohérent d’user de ces théories en négligeant ce qu’elles génèrent.

A défaut de pouvoir observer directement le multivers, certains chercheurs pensent pouvoir déceler les indices attestant de l’influence d’univers parallèles sur notre Univers. Parmi ceux-ci, le fameux Point froid… Le résultat des recherches de Ruari Mackenzie a fait beaucoup de bruit, surtout dans la presse généraliste : il faut préciser que la mention du multivers tient sur seulement quatre lignes – dans un article de douze pages…

Dans un article publié sur le site IFLSCIENCE!, Mackenzie rappelle :

Les résultats du papier ne disent rien d’une manière ou d’une autre sur possibilité de l’existence d’un multivers. Ce que nous avons essayé de faire était de tester l’affirmation selon laquelle il y avait un énorme supervide aligné avec le Point froid qui était si extrême qu’il aurait pu créer le Point froid du rayonnement fossile, peut-être par un effet qui dépasse la cosmologie standard.

Le désir d’exploration de l’homme se fonde sur sa curiosité à vouloir déceler ce qu’il y au-delà : au-delà des montagnes, des océans, de l’atmosphère terrestre, du Système solaire, de la galaxie, des trous noirs, de l’Univers… Nul ne sait répondre pour le moment à certaines des questions que soulèvent ces nouvelles frontières géographiques et intellectuelles qui, en attendant, sont les pourvoyeuses de nos éternels rêves d’ailleurs…

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Pourquoi la Terre tourne-t-elle autour du Soleil ? /2018/03/08/pourquoi-la-terre-tourne-t-elle-autour-du-soleil/ /2018/03/08/pourquoi-la-terre-tourne-t-elle-autour-du-soleil/#comments Thu, 08 Mar 2018 17:18:08 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=246 Parfois, certaines questions nous semblent si triviales qu’elles ne méritent aucune explication. La Terre est ronde. Elle tourne autour du Soleil. Ces faits si communs sont pourtant contraire à l’intuition. Chaque nuit, le Soleil semble tomber, là-bas, vers l’horizon. Et pourtant, elle tourne… Le fou sur la colline E pur si muove ! Et pourtant elle […]

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Parfois, certaines questions nous semblent si triviales qu’elles ne méritent aucune explication. La Terre est ronde. Elle tourne autour du Soleil. Ces faits si communs sont pourtant contraire à l’intuition. Chaque nuit, le Soleil semble tomber, là-bas, vers l’horizon. Et pourtant, elle tourne…

Le fou sur la colline

E pur si muove ! Et pourtant elle tourne ! D’après la légende, c’est la phrase qu’aurait marmonné Galilée, forcé de réfuter ses théories devant l’Inquisition. Car contrairement à ce qu’imposaient les dogmes religieux de l’époque, la théorie héliocentrique, pensée mathématiquement par Copernic puis observée dans le ciel par Galilée, était correcte.

Le fou sur la colline, comme le chantait McCartney, voit le Soleil tomber, tandis que son esprit voit le monde tourner :

But the fool on the hill
Sees the sun going down
And the eyes in his head
See the world spinning round

Oui, la Terre tourne bien autour du Soleil, et pas l’inverse. Un féroce coup porté à l’anthropocentrisme, l’idée que l’homme est au centre de l’Univers. Les siècles qui suivirent repoussèrent constamment nos horizons et notre place prétendument privilégiée dans le cosmos : non seulement le Soleil ne tournait pas autour de la Terre, mais cette dernière n’était qu’une planète parmi tant d’autres, dans un système solaire parmi tant d’autres, dans une galaxie parmi tant d’autres…

Rêvons un peu : dans un univers parmi tant d'autres ? C'est la théorie du multivers (vue d'artiste).
Rêvons un peu : dans un univers parmi tant d’autres ? C’est la théorie du multivers (vue d’artiste).

Mais ne nous éloignons pas trop, et revenons à l’héliocentrisme. Et pourtant elle tourne ! Oui, mais pourquoi ? Quel phénomène physique en est responsable ?

Vous me direz sans doute : la gravité, qui attire les objets les uns vers les autres. C’est pour cela que le verre tombe de la table et s’écrase au sol, souillant de jus d’orange le carrelage. La gravité. C’est pour cela que la Lune tourne autour de la Terre, et la Terre autour du Soleil. Rideau, bonsoir.

Attendez ! Mais pourquoi donc la Lune ne s’écrase-t-elle pas sur la Terre, attirée par sa gravité, et pourquoi la Terre ne va-t-elle pas se ruer tout droit sur le Soleil ? Certes, nous ne serions alors pas là pour discuter de questions triviales…

La toile de l’espace-temps

Newton vérifie d’un œil sévère ce que je raconte ici.

Pour répondre à cette question, il va falloir remonter les couloirs du temps, au moins jusqu’au XVIIIème siècle. Le siècle de l’un des plus grands génies de tous les temps, peut-être même le plus grand de tous, sir Isaac Newton.

Dans son grand livre Principes mathématiques de la philosophie naturelle, il sera le premier à  définir la gravité comme une force universelle qui attire tous les corps les uns vers les autres. L’homme vers la Terre, la Lune vers la Terre, la Terre vers le Soleil. Cette révolution est immense, et sans les équations de Newton, point de monde moderne, point de ponts et de gratte-ciel, point d’avions et de fusées !

Et pourquoi la Terre tourne autour du Soleil plutôt que de tomber dedans ? Tout est question d’équilibre entre deux forces :

  • L’inertie de la Terre, qui la pousse à poursuivre son chemin en ligne droite
  • L’attraction du Soleil sur la Terre

La Terre « tombe » donc en permanence sur le Soleil, mais cette attraction est compensée à chaque instant par l’inertie de la Terre.

Prenez une pomme et lancez là loin devant vous. Elle réalise un trajet en forme d’ellipse, puis tombe sur le sol. Lancez-là un peu plus fort. Elle atterrit un peu plus loin et retombe à nouveau sur le sol, en suivant toujours un trajet sous forme d’ellipse. Et bien imaginez que vous puissiez la lancer encore plus fort, bien plus fort. La vitesse de la pomme est telle qu’elle file quasiment tout droit, tombe sans cesse sans jamais toucher le sol, elle dépasse à chaque instant l’horizon de la Terre : elle est en orbite. Lancez-là encore plus fort ; elle atteindra sa vitesse de libération – la vitesse nécessaire pour qu’elle échappe à l’attraction gravitationnelle de la Terre – et filera tout droit dans l’espace.

La vitesse la pomme est telle qu'elle tombe sans cesse plus loin, ne décélérant jamais elle tourne donc autour de la Terre...
La vitesse de la pomme est telle qu’elle tombe sans cesse plus loin, ne décélérant jamais : elle tourne donc autour de la Terre…

Avec sa Théorie de la relativité générale, en 1915, Albert Einstein ira beaucoup plus loin. La gravité n’est alors plus considérée comme une force, mais comme une conséquence de la géométrie de notre espace.

La gravité est la courbure infligée à l’espace-temps par les corps massifs qui y sont contenus. Comme si nous vivions tous sur un tissu qui se déformait sous notre poids.

Métaphore intéressante tirée du livre "Par-delà le visible" de Carlo Rovelli : comme une bille dans un entonnoir, la Terre tourne autour du Soleil qui déforme l'espace-temps.
Métaphore intéressante tirée du livre « Par-delà le visible » de Carlo Rovelli : comme une bille dans un entonnoir, la Terre tourne autour du Soleil qui déforme l’espace-temps.

Et donc, si la Terre tourne autour du Soleil, c’est parce que notre étoile courbe l’espace autour de lui, le déforme.

Je vous le disais : e pur si muove !

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Oumuamua – Un visiteur venu d’ailleurs /2017/12/26/oumuamua-visiteur-venu-dailleurs/ /2017/12/26/oumuamua-visiteur-venu-dailleurs/#comments Tue, 26 Dec 2017 18:56:28 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=855 Parfois, un événement inattendu vient troubler la sérénité des ballets auxquels se livrent les objets célestes. Ainsi de cet objet interstellaire venu nous rendre visite, Oumuamua, apportant avec lui son lot d’hypothèses, de conjectures et de fantasmes… Oumuamua, qui es-tu donc ? Le messager Le 19 octobre 2017, un étrange objet est repéré dans le ciel […]

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Parfois, un événement inattendu vient troubler la sérénité des ballets auxquels se livrent les objets célestes. Ainsi de cet objet interstellaire venu nous rendre visite, Oumuamua, apportant avec lui son lot d’hypothèses, de conjectures et de fantasmes… Oumuamua, qui es-tu donc ?

Le messager

Le 19 octobre 2017, un étrange objet est repéré dans le ciel par l’astronome Robert Weryk, à l’aide du télescope Pan-STARRS1 de Hawaï. Alors situé à près de 33 millions de kilomètres de la Terre, il n’est déjà plus qu’un tout petit point que l’on prend d’abord pour une comète. Une comète d’un genre tout particulier : elle vient en effet du milieu interstellaire.

Plusieurs télescopes pointent alors leurs objectifs sur le visiteur, à la suite de quoi un article est publié dans la revue Nature, intitulé « Une brève visite d’un astéroïde interstellaire rouge et extrêmement allongé. » En fait, tout est déjà résumé dans le titre. Car il ne s’agit pas d’une comète mais bien d’un astéroïde, puisqu’il ne contient pas de chevelure – ce halo composé de gaz et de poussière qui entoure le noyau des comètes. Sa couleur est rouge, peut-être parce qu’il a été bombardé par des rayons cosmiques, ou qu’il contient des éléments organiques. Sa forme est inhabituelle : il mesure 180 mètres de long pour 30 de large, si bien qu’il est rapidement comparé à un cigare.

Oumuamua, observé ici par le télescope William Herschel, est ce petit point au centre de l’image.
(crédits : A Fitzsimmons, Queen’s University Belfast/Isaac Newton Group, La Palma)

L’astéroïde interstellaire se voit également affublé d’un nom : Oumuamua, un mot hawaïen particulièrement bien choisi signifiant « L’éclaireur. » Son nom complet, tel que décidé par l’Union astronomique internationale (qui est chargé de définir la nomenclature des objets célestes, est 1I/2017 U1 (ʻOumuamua). La lettre I, nouvellement introduite, fait tout simplement référence à sa nature interstellaire. Oumuamua est un objet pionnier. Pour la première fois, l’homme détecte à sa proximité un objet venu d’un autre Système solaire que le sien.

Mais comment sait-on qu’il provient bien d’un autre Système solaire ? A cause de son orbite. Davide Farnocchia, astronome à la NASA, explique dans un article du site EarthSky :

C’est l’orbite la plus extrême que j’ai jamais vu. Elle va très vite, et sur une telle trajectoire que nous pouvons affirmer avec confiance que cet objet est en chemin pour quitter le Système solaire et ne plus jamais revenir.

Oumuamua est un messager venu du système solaire Vega, dans la constellation de la Lyre, à près de 25 années-lumière de la Terre. Son excentricité orbitale est de 1.20, la plus forte valeur jamais enregistrée. En fait, l’excentricité orbitale décrit tout simplement la forme d’une orbite d’un objet céleste. Lorsque sa valeur est de zéro, l’orbite est un cercle. A plus de 1, l’orbite est dite hyperbolique : l’objet n’est plus attaché à l’étoile ou à la planète autour duquel il orbite. Oumuamua est donc d’abord attiré par le Soleil, s’en approche au plus près le 9 septembre avant d’en être éjecté à la vitesse de 44 kilomètres par seconde, un peu à la manière d’un poids lancé par un athlète. Le 1er novembre, Oumuamua approche Mars. Il passera à proximité de Jupiter en mai 2018, Saturne en janvier 2019, et Neptune en 2022. Sa vitesse diminuera progressivement, et Oumuamua mettra près de 20 000 ans pour quitter l’héliosphère, aux confins de notre Système solaire. De toute façon, depuis la mi-décembre, Oumuamua est invisible aux yeux mêmes de nos télescopes les plus performants, étant trop petit et trop rapide.

Le voyage d’Oumuamua dans notre Système solaire.

Rendez-vous avec Rama

Parfois, le cosmos offre de bien curieuses résonances entre l’art et la science. Oumuamua rappelle un autre visiteur interstellaire, issu d’une œuvre de science-fiction de l’auteur américain Arthur C. Clarke (l’homme derrière le roman 2001, l’Odyssée de l’espace), Rendez-vous avec Rama, paru en 1973.

Les similitudes sont à première vue assez troublantes :

  • Le dit objet, appelé Rama, provient d’un autre Système solaire
  • Il est d’abord identifié comme étant un simple astéroïde
  • Sa forme est particulière : 20 kilomètres de diamètre sur 50 de long
  • Rama utilise la force gravitationnelle du Soleil pour quitter le Système solaire

Le très grand Arthur C. Clarke.

Et puis Arthur C. Clarke est né il y a exactement un siècle ! Il s’avère que Rama est en réalité une superstructure extraterrestre similaire au cylindre O’Neill, concept inventé par le scientifique du même nom dans les années 60 pour faciliter les voyages au très long cours dans l’espace.

Dans le cas d’Oumuamua, le rendez-vous semble toutefois manqué… Difficile en effet, avec nos technologies actuelles, de pouvoir y approcher une sonde : il voyage près de 3 fois plus vite que les sondes humaines les plus rapides !

Mais quand même… Avec un matériel aussi propice au rêve, comme toujours, la frontière entre science et science-fiction s’amincit, laissant place aux hypothèses les plus hasardeuses, mais aussi les plus fascinantes… Et si Oumuamua était l’éclaireur d’une civilisation extraterrestre ?

Premier contact

Les caractéristiques particulières d’Oumuamua ont rapidement suscité l’intérêt du désormais célèbre institut SETI et du projet Breakthrough Listen (porté par le milliardaire russe Yuri Milner) tous deux en quête désespérée d’un quelconque indice trahissant une vie extraterrestre. Peut-on reprocher à l’humanité de se poser sans cesse cette question, alors qu’elle lutte en plus pour sa survie et celle de l’écosystème de sa planète ? Certainement pas. Si nous sommes seuls, alors l’humanité est un trésor inestimable qu’il faudra préserver à tout prix. Si nous ne sommes pas seuls, cela sera un bouleversement philosophique et culturel majeur, à même de changer la conception de notre place au sein de l’Univers. Mais aurons-nous un jour une réponse, ou resterons-nous à jamais dans la nuit, condamnés à rêver en regardant les étoiles ?

A bien des égards, le traitement médiatique d’Oumuamu rappelle celui de l’étoile KIC 8462852, dont les étranges fluctuations de luminosité pouvaient selon certains spéculateurs être dus à la présence de la superstructure d’une civilisation extraterrestre….
(crédits : NASA/JPL-Caltech)

Comme l’explique lui-même Yuri Milner :

Nous ne voulons pas être sensationnalistes, et nous sommes très réalistes sur les chances que cet objet soit artificiel, mais parce que cette situation est unique nous pensons que l’humanité peut bien s’offrir dix heures d’observation en utilisant le meilleur équipement de la planète pour vérifier une hypothèse à faible probabilité.

L’objectif est simple : capter un signal radio artificiel. Pour le moment, les résultats n’indiquent rien de tel. C’est ce qui ressort en tout cas des observations réalisées à l’aide du télescope Green Bank, utilisé par le projet Breaktrough Listen, et du Allen Telescope Array, utilisé quant à lui par l’institut SETI. Les études se poursuivent néanmoins tandis que d’autres projets, bien plus ambitieux, sont évoqués. Une seule solution, en effet, permettrait d’infirmer définitivement l’hypothèse d’un objet fabriqué par une civilisation extraterrestre… Laquelle ? Rendre visite à Oumaouma, tout simplement !

Voyage au bout de la nuit

Le 30 octobre, soit onze jours après qu’Oumuamua ait été repéré dans le ciel, l’organisation anglaise Initiative for Interstellar Studies (soit en français Initiative pour les études interstellaires) annonce le projet Lyra, du nom de la constellation d’où semble provenir Oumuamua. L’objectif principal est d’étudier la faisabilité de l’envoi d’une sonde près d’Oumuamua, en utilisant les technologies actuelles ou disponibles dans un futur proche.

Un article résumant ces recherches est publié sur la plateforme Arxiv le 8 novembre. Il s’articule autour des différents défis posés à la science. Plus vite une telle mission est lancée, plus vite elle atteindra Oumuamua. Mais de nouvelles technologies nécessitent d’être développées, et cela demande un certain temps, laissant le temps à notre visiteur de s’éloigner… Autre question, celle de la vitesse de propulsion. Faut-il privilégier une sonde se déplaçant à grande vitesse, parvenant à rejoindre l’astéroïde en quelques années seulement mais disposant de très peu de temps à ses côtés, ou au contraire une vitesse plus réduite, permettant des mesures plus poussées mais demandant près d’une décennie de trajet ? Les auteurs de l’article optent pour un lancement entre 2023 et 2027, pour une durée de mission totale comprise entre 30 ans et 5 ans, avec un simple survol de l’objet et non une insertion orbitale.

Et tout cela comment ? L’article évoque des technologies qui seront disponibles sous peu, tel que le lanceur Space Launch System de la NASA (dont le premier vol est prévu pour 2018) ou le Big Falcon Rocket de l’entreprise américaine SpaceX (dont le lancement est prévu lui pour le début de la prochaine décennie).

L’article conclut :

La découverte du premier objet interstellaire entrant dans notre Système solaire est un événement excitant et pourrait être la chance d’une vie, ou même de plusieurs vies.

Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien

Parallèlement, la presse scientifique et généraliste couvre l’actualité particulièrement chargée autour d’Oumuamua. Dernièrement, une étude a rapporté qu’Oumuamua pourrait finalement être une comète dont la surface, pendant ce long voyage, aurait été progressivement asséchée par les rayons cosmiques. Éternel retour aux sources…

Finalement, c’est bien un mystère qui est entré dans notre Système solaire. Un de plus, mais n’est-ce pas souvent ainsi que la science se construit ?

Peut-être que le mystère Oumuamua ne s’éclaircira jamais. S’éloignant vers les confins du Système solaire, il deviendra chaque jour un peu inaccessible. Une mission si coûteuse, si hasardeuse, si longue… Peut-être que les hommes des décennies à venir s’en détourneront. Par contre, nous voilà prévenus : des objets interstellaires pénètrent dans notre environnement cosmique proche, ils peuvent être détectés, observés, analysés. Si nous laissons filer l’éclaireur, espérons que ce soit pour mieux attraper les troupes qui suivront.

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La Grande tache blanche ou le chaos sur Saturne /2017/11/16/grande-tache-blanche-chaos-saturne/ /2017/11/16/grande-tache-blanche-chaos-saturne/#respond Thu, 16 Nov 2017 18:16:42 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=831 Une tempête saturnienne peut durer des mois entiers et s’étaler sur des centaines de milliers de kilomètres. A côté, nos tempêtes terrestres semblent bien inoffensives. Peut-on concevoir les forces qui sont à l’œuvre pour défigurer une planète comme Saturne ? Une image du chaos 2010. Depuis déjà plus de six ans, la sonde Cassini de […]

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Une tempête saturnienne peut durer des mois entiers et s’étaler sur des centaines de milliers de kilomètres. A côté, nos tempêtes terrestres semblent bien inoffensives. Peut-on concevoir les forces qui sont à l’œuvre pour défigurer une planète comme Saturne ?

Une image du chaos

2010. Depuis déjà plus de six ans, la sonde Cassini de la NASA orbite autour de Saturne. Elle étudie sa composition, ses lunes et, dans la lignée des sondes pionnières que furent Voyager 1 et 2, elle fournit d’incroyables images qui bouleversent notre conception de ces mondes extraterrestres. En décembre 2011, elle photographie une étrange et gigantesque tache blanche dans l’hémisphère nord de Saturne. C’est en réalité un astronome amateur, Anthony Wesley, qui observera le premier cette tache, peu avant Noël, avant que la sonde Cassini ne prenne le relais. Peu à peu, ce qui est en fait une gigantesque tempête grossit et se déplace vers l’ouest. Près de cinq mois plus tard, ce maelström aux dimensions extraordinaires encercle totalement l’hémisphère nord de Saturne… Comme si une gigantesque traînée de peinture blanche venait peu à peu maculer une toile de maître. Et puis elle disparaît.

L’évolution de la tempête.

Ce n’est pas la première fois qu’une tempête défigure ainsi la géante gazeuse. Sept événements similaires ont été observés depuis 1876. L’un d’entre eux, observé en 1933 par Will Hay, acteur comique et astronome amateur, est resté célèbre, Hay sera d’ailleurs longtemps considéré comme le découvreur de ce qui est bientôt appelé la Grande tâche blanche, en référence à la célèbre tâche rouge de Jupiter. Une différence, toutefois, au-delà de la couleur : la tâche de Saturne est temporaire, et surtout périodique. Elle semble en effet apparaître toutes les trois décennies, soit à peu près toutes les années saturniennes (la période de révolution de Saturne étant d’environ 29 ans). Sa durée est variable, mais elle ne dépasse guère quelques mois.

Ces tempêtes dont la taille démesurée dépasse celle de notre planète s’étalent sur des centaines de milliers de kilomètres, et ne cessent que lorsqu’elles encerclent toute un hémisphère. De quoi rappeler le chaos qui sévit sur ces lieux cauchemardesques, dont la sonde Cassini nous renvoie une image forcément sublimée. Comme le chantait Georges Brassens :

Il est morne, il est taciturne
Il préside aux choses du temps
Il porte un joli nom, Saturne
Mais c’est un dieu fort inquiétant
Il porte un joli nom, Saturne
Mais c’est un dieu fort inquiétant

Il y a de l’eau dans le gaz

Par le passé, il fallait se contenter, pour observer ces tempêtes, d’images prises depuis la Terre. Il en va tout autrement avec Cassini, véritable laboratoire spatial disposant de douze instruments scientifiques, et qui reste d’ailleurs à ce jour la sonde spatiale la plus lourde jamais envoyée dans l’espace (5 853 kilogrammes).

Vue d’artiste de l’entrée de la sonde Cassini dans l’atmosphère de Saturne, à la fin de sa mission.

Une étude réalisée en 2015 par deux scientifiques de l’université Caltech (Etats-Unis) dévoile une part du mystère de ces tempêtes. Surprise : la présence d’eau dans l’atmosphère de Saturne entre en jeu dans le mécanisme complexe de leur formation. Car oui, Saturne contient de l’eau, qui provient de ses anneaux – eux-mêmes principalement composées d’eau gelée – et qui vient arroser sa haute atmosphère.

La convection par Wikipedia, c’est super simple.

Les molécules d’eau, plus lourdes, se déplacent sous la partie supérieure de l’atmosphère de Saturne, surtout composée d’hélium et d’hydrogène. Ces deux couches ne se mélangent pas, un peu à la manière de l’eau qui ne se mélange pas non plus avec l’huile. Mais les forces qui régissent Saturne sont autrement plus complexes que celles qui régissent la vinaigrette, c’est entendu. Sur Terre, le phénomène d’instabilité convective intervient dans le processus de formation des tempêtes. L’air est en effet très instable : basiquement quand il chauffe il monte, et quand il se refroidit il descend. De l’air suffisamment chargé en particules d’eau qui remonte (parce que le sol se réchauffe, par exemple au contact du Soleil), peut mener à la formation de nuages qui, en s’amoncelant, annoncent l’orage et la tempête.

Sur Saturne, toujours selon cette étude, l’instabilité convective semble également entrer en jeu dans la formation des tempêtes. Lorsque vient l’hiver, la haute atmosphère de Saturne se refroidit, peu à peu. Elle devient plus dense, et a du coup tendance à descendre à son tour. L’air chaud et humide, lui, remonte, se condense : la tempête se lève.

Si de telles tempêtes ne surviennent que tous les 30 ans environ – soit peu ou prou une année saturnienne, c’est que l’atmosphère de Saturne est si épaisse qu’il faut bien tout un hiver pour la refroidir ainsi. C’est la raison pour laquelle la tempête intervient au début du printemps. Et si Jupiter n’est pas touchée par des tempêtes, c’est parce que l’eau semble être absente de son atmosphère. A la sonde Juno, désormais, de confirmer cela.

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Aux origines de la Lune /2017/10/24/aux-origines-de-lune/ /2017/10/24/aux-origines-de-lune/#comments Tue, 24 Oct 2017 14:10:31 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=804 La Lune, comme l’écrivait Victor Hugo, invite à parler tout bas des choses infinies. Remontons donc jusqu’aux confins du temps pour tenter de déterminer son origine. L’éternelle compagne de la Terre, qui illumine et rassure nos nuits, serait-elle issue d’une terrible déchirure ancestrale ? Une vieille compagne Le satellite naturel qui a donné son nom […]

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La Lune, comme l’écrivait Victor Hugo, invite à parler tout bas des choses infinies. Remontons donc jusqu’aux confins du temps pour tenter de déterminer son origine. L’éternelle compagne de la Terre, qui illumine et rassure nos nuits, serait-elle issue d’une terrible déchirure ancestrale ?

Une vieille compagne

Le satellite naturel qui a donné son nom à ce site nous est si familier qu’il est difficile de croire qu’il n’a pas toujours tourné autour de la Terre. Éternelle compagne de nos nuits, la Lune exerce aussi son influence gravitationnelle sur notre planète par des effets plus ou moins visibles, le plus connu se traduisant par le phénomène des marées.

Et pourtant, donc, les nuits terrestres n’ont pas toujours été éclairées par la Lune. Mais de quelle époque parlons-nous ? Prenons un peu de hauteur, et regardons derrière nous :

  • L’Univers s’est formé suite au Big Bang il y a 13,4 milliards d’années
  • Notre Système Solaire s’est lui formé il y a 4,55 milliards d’années autour d’un disque protoplanétaire, un agrégats de gaz et de poussières à partir duquel se sont formés les différents corps célestes qui le composent
  • L’accrétion de la Terre à partir de ces poussières est estimée à environ 4,54 milliards d’années
  • L’âge de la Lune, enfin, est estimé à près de 4,4 milliards d’années

Le chaos de l’Hadéen

Au regard de l’âge de la Terre, la Lune est donc apparue très précocement, durant l’Hadéen, le premiers temps géologique de notre planète. Et à peine sorti du chaos primitif de sa formation, la Terre est déchiré par un événement cataclysmique qui mènera à la formation de la Lune. Un ou plusieurs impacts géants, croit-on savoir aujourd’hui, après que plusieurs hypothèses se soient succédé pour expliquer la présence de la Lune. Retour sur une question aussi triviale que fascinante.


Succession d’hypothèses

La première hypothèse sur l’origine de la Lune date de 1873. L’astronome français Edouard Roche postule que la Terre et la Lune sont issues des mêmes matériaux primitifs et qu’elles se sont formées en même temps. Un agrégat plus important de matériaux aurait formé la Terre, et un autre plus réduit la Lune.

Dans son livre La constitution et l’origine du Système solaire, il écrit :

Il a pu arriver aussi exceptionnellement, et telle est l’origine probable de la Lune, qu’un amas de vapeurs déjà refroidies s’étant formé au dedans de la nébuleuse terrestre, dans la région équatoriale et à une certaine profondeur, cet amas soit devenu un centre de condensation autour duquel se sont groupés d’autres amas semblables. De cette agglomération est résultée, dans l’atmosphère même de la Terre, une nouvelle nébuleuse, origine de la Lune.

Cette hypothèse qui a le mérite d’être pionnière a toutefois été rapidement démentie, et les analyses postérieures de la composition de la Lune la réfutèrent complètement. Puisqu’elles seraient issues des mêmes matériaux, la Terre et la Lune devraient avoir une composition similaire, ce qui, comme nous le verrons, n’est pas le cas.

Cinq ans plus tard, rien de moins que le fils de Charles Darwin, George Howard Darwin, propose une hypothèse alternative : la vitesse de rotation de la Terre aurait été si importante qu’un morceau se serait arraché de celle-ci, devenant plus tard la Lune, et laissant sur Terre une énorme cicatrice correspondant aujourd’hui à l’océan Pacifique. Là encore, difficile de concevoir un tel événement et une telle vitesse de rotation…

Il en convient toutefois :

Rien ne nous permet d’affirmer que cette théorie est la véritable explication de la naissance de la Lune, et je dirais que c’est  de la pure spéculation, sans possibilité de vérification.

Thomas Jefferson Jackson See fournit en 1910 une hypothèse plus séduisante : le champ gravitationnel de la Terre aurait capturé un corps et l’aurait disloqué, avant que ses débris ne forment la Lune.

En fait, ces hypothèses peinent à expliquer pas certaines des caractéristiques particulières du couple Terre-Lune :

  • La différence de leur composition : la Lune contient nettement moins de fer que la Terre
  • L’inclinaison de l’orbite de la Lune

Il faudra attendre les missions Apollo dans les années 60 et 70 pour faire avancer la question, notamment grâce à l’étude des roches lunaires.

Le géologue Harrison Schmitt de la mission Apollo 17 se rend compte que ce gros caillou sera un peu compliqué à ramener sur Terre

Deep Impact

Dans la mythologie grecque, Théia est la fille d’Ouranos et de Gaïa, les deux divinités symbolisant le Ciel et la Terre. Théia épouse son frère Hypérion, de qui elle mettra au monde trois enfants : Hélios, Eos et Séléné, dieux du Soleil, de l’Aurore et de la Lune. Séléné, celle qui voyage sur un char argenté à travers le ciel nocturne, baignant le monde de sa douce lumière.

Théia : c’est naturellement le nom qui a été donné à l’immense impacteur qui serait entré en collision avec la Terre il y a 4,5 milliards d’années, peut-être à cause de l’influence gravitationnelle de Jupiter ou Vénus, et aurait donné naissance à la Lune. Sa taille est estimée à celle de Mars, soit près de 6 800 kilomètres ! Problème : dans la majorité des modèles présentés, ce sont principalement les débris de Théia qui forment la Lune. Or les roches lunaires rapportées par les missions Apollo révèlent des isotopes d’oxygène similaire à ceux de la Terre.

Et BOUM ! Impact entre deux corps célestes (NASA/JPL-Caltech/T. Pyle)

Il faut alors concevoir des modèles alternatifs pour satisfaire l’idée que ce sont principalement des débris de la Terre qui ont formé la Lune.

Dans le modèle proposé en 2012 dans le magazine Science par Matija Ćuk et Sarah Stewart, Théia percute la Terre à 20 kilomètres par seconde. A cette vitesse, elle pénètre entièrement le manteau de la Terre pour parvenir jusqu’à son noyau, éjectant de la matière dans l’espace et formant un véritable trou dans la planète. Un disque de débris composé principalement de morceaux de la Terre s’agglomère pour former la Lune.

Comme le précise Sarah Stewart :

Le disque n’a presque pas de fer puisque le cœur de fer de Theia a fusionné avec le cœur de la Terre. Ce scénario d’impact est cohérent avec les masses mesurées de la Terre et de la Lune, le faible fer contenu dans la composition de la Lune, et la composition isotopique similaire du manteau de la Lune et de la Terre.

En rafale

Une étude israélienne publiée début 2017 par la revue Nature Geoscience propose à nouveau une hypothèse alternative : ce ne serait pas un impact qui aurait donné naissance à la Lune, mais plusieurs. Ceux-ci auraient permis à plusieurs petits satellites d’émerger, qui auraient fini par s’agglomérer et former la Lune telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Une fois encore, cette hypothèse ne fait pas l’unanimité, ou tout du moins elle nécessite encore des ajustements. Une vingtaine d’impacts seraient ainsi nécessaires pour permettre à toutes les mini-lunes de s’agglomérer entre elles et former un satellite gros comme la Lune. Gareth Collins, qui a signé dans Nature Geoscience un article commentant l’étude israélienne, précise :

Si, comme il semble probable, la fusion est imparfaite ou si des mini-lunes sont perdues, beaucoup plus d’impacts pourraient être requis, ce qui rendrait par conséquent la nécessaire séquence d’événements encore moins probable que n’importe lequel des scénarios exotiques à un seul impact.

Le mystère demeure donc. Mais les meilleurs amours sont peut-être celles qui ne s’expliquent pas. Lorsque la recherche déterminera définitivement pourquoi cet astre gris tourne autour de notre globe, peut-être alors les poètes n’auront plus rien à dire sur elle…

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Et l’homme découvrit une exoplanète /2017/09/02/lhomme-decouvrit-exoplanete/ /2017/09/02/lhomme-decouvrit-exoplanete/#comments Sat, 02 Sep 2017 07:48:44 +0000 http://dans-la-lune.fr/?p=778 L’intuition de l’homme le pressentait, la science le confirma en 1995 : autour des étoiles de notre ciel tournent d’autres planètes. Notre Système solaire n’avait dès lors plus rien d’unique, et notre place rien de centrale dans le cosmos – s’il y avait encore besoin de le préciser. Retour sur une découverte historique. Horizons cosmologiques L’histoire […]

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L’intuition de l’homme le pressentait, la science le confirma en 1995 : autour des étoiles de notre ciel tournent d’autres planètes. Notre Système solaire n’avait dès lors plus rien d’unique, et notre place rien de centrale dans le cosmos – s’il y avait encore besoin de le préciser. Retour sur une découverte historique.

Horizons cosmologiques

L’histoire de l’astronomie n’est qu’une éternelle redéfinition de la place de l’homme au sein de l’Univers. Nos horizons se sont pour ainsi dire constamment éloignés. Depuis l’homme qui, un jour, a trouvé un morceau de terre au-delà de la mer qu’il croyait infinie, jusqu’à la découverte des milliards d’autres galaxies qui nous entourent, en passant par la fameuse révolution copernicienne. Ainsi va le désir d’exploration de l’homme , qui le pousse à quitter le doux confort utérin pour se confronter aux dangers du monde extérieur. Au risque d’abimer son ego, de comprendre qu’il n’est qu’un homme parmi tant d’autres, sur une planète parmi tant d’autres, dans une galaxie parmi tant d’autres, et peut-être même, selon les hypothèses les plus audacieuses, au sein d’un univers parmi tant d’autres.

Curieusement, jusqu’en 1995, alors que depuis soixante ans l’homme connaissait l’existence d’autres galaxies et que le télescope spatial Hubble commençait à scruter le ciel, aucun scientifique ne pouvait affirmer avec certitude que des planètes tournaient autour d’autres étoiles que notre Soleil. Comment donc ? Bien sûr, certains penseurs l’affirmaient depuis longtemps. Lucrèce, déjà, au Ier siècle après Jésus-Christ, affirmait que d’autres terres existaient au sein de notre univers infini. Quinze siècles plus tard, Giordano Bruno fut brûlé pour avoir défendu l’idée de la pluralité des mondes :

Il est donc d’innombrables soleils et un nombre infini de terres tournant autour de ces soleils.

Giordano Bruno fut envoyé sur le bûcher pour avoir osé imaginer l’infini. Une image tirée de la série documentaire Cosmos.

L’intuition avait amené l’homme à supposer que les étoiles du ciel ne devaient guère différer de notre Soleil, et que par conséquent des planètes devaient y orbiter, cependant leur observation est pendant longtemps restée impossible. Pourquoi ? Car les exoplanètes sont des objets situés à des distances très lointaines, que leur taille est réduite et qu’elles renvoient peu de lumière : les observateurs sont éblouis par la lumière de l’étoile autour de laquelle elles orbitent. C’est la raison pour laquelle l’imagerie directe reste encore aujourd’hui  très rare, et qu’il faut souvent recourir à d’autres méthodes pour « deviner » la présence d’une planète autour d’une étoile.

Proto-découvertes

L’histoire ne retient que l’essentiel : la première exoplanète, dit-on, fut découverte en 1995. La réalité est plus subtile : la première exoplanète orbitant autour d’une étoile sur la séquence principale (donc similaire à notre Soleil) fut découverte en 1995. D’autres exoplanètes furent pourtant bien découvertes auparavant, parmi lesquelles :

  • Gamma Cephei Ab : elle fut détectée dès 1988 mais des travaux remirent son existence en doute en 1992 ; son existence ne fut définitivement confirmée qu’en 2002
  • HD 114762 b : détectée dès 1989, elle fut identifiée comme étant une naine brune
  • PSR B1257+12 : sous ce nom peu poétique se cache un pulsar autour duquel orbitent plusieurs planètes découvertes par l’astronome polonais Alexander Wolszczan en 1992

Mais l’histoire a retenu d’autres noms.

La Terre n’est plus seule

Le 6 octobre 1995, à 15 heures et 30 minutes, Michel Mayor de l’observatoire de Genève et son étudiant Didier Queloz révèlent au monde leur découverte : une planète située dans une autre système solaire, à 51 années-lumière de la Terre. Elle orbite autour de l’étoile 51 Pegasi, une naine jaune similaire à notre Soleil. Elle est appelée 51 Pegasi b, comme le prévoit la nomenclature – la lettre a étant réservée à l’étoile. 51 Pegasi b est une planète étonnante, qui n’a pas d’équivalent dans notre Système solaire : sa masse est d’environ 150 fois celle de la Terre, et elle effectue une révolution complète autour de son étoile en seulement 4 jours !

Comment les deux chercheurs ont-ils pu réaliser un tel exploit couvert par toute la presse internationale mais qui pourtant laisse sceptique certains de leurs confrères ?

Didier Queloz et Michel Mayor à l’Observatoire de La Silla, au Chili.

En 1993, après déjà plusieurs décennies de réflexion et de tatonnements, Michel Mayor met au point le spectrographe Elodie qui permet d’observer les variations de vitesses radiales. Il s’agit là de la toute première méthode de détection des exoplanètes : une étoile soumise à l’influence gravitationnelle de sa planète se déplace légèrement, ce qui modifie son éclat. Le spectrographe étudie le spectre de la lumière émise par l’étoile et y révèle la planète.

A la fin 94, Mayor et Queloz repèrent l’exoplanète qui les rendra célèbres, mais ils préfèrent poursuivre leurs observations, sceptiques devant les caractéristiques étranges de l’objet. En juillet 95, ils n’ont plus de doute. Il est temps d’annoncer au monde que les 9 planètes du Système solaire ne sont plus seules dans le cosmos.

Dans un article consacré aux vingt ans de cette découverte historique, Mayor se souvient :

Nous avons alors été pris dans un tourbillon médiatique, auquel nous n’étions pas préparés. Je pensais que cela passerait après quelques mois. Mais non. Ça continue encore aujourd’hui !

En novembre 1995, les deux chercheurs publient un article dans Nature intitulé A Jupiter-mass companion to a solar-type star, qui se conclut ainsi :

La recherche d’exoplanètes peut être incroyablement riche en surprises. Depuis un système solaire complet détecté autour d’un pulsar, jusqu’aux paramètres orbitaux inattendus de 51 Peg b, les recherches comment à révéler l’extraordinaire diversité des sites de formation planétaires.

En 2015, 51 Pegasi b fait à nouveau parler d’elle : elle est la première exoplanète dont on a détecté directement la lumière. Michel Mayor, lui, poursuit sa quête : il dirige en 2007 l’équipe d’astronomes qui découvre Gliese 581c, première exoplanète connue aux caractéristiques similaires à celles de notre planète.

A ce jour, plus de 3500 exoplanètes ont été découvertes. Il y en aurait plus de 200 milliards rien que dans notre galaxie, la Voie Lactée.

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