Par quelle sorte de processus chimique l’inerte est-il devenu vivant ? Comment est apparue la toute première cellule ? De quelles molécules était-elle issue ? Comment a-t-elle acquis la capacité de croître, de se répliquer ? S’agit-il d’un mélange particulier entre de la matière organique et de l’eau ? Faut-il des conditions particulières ? Quel curieux mystère ! En effet, de cette vie primitive, de cette première chose vivante, est issue l’intégralité de toutes les espèces ayant vécues, vivantes et qui vivront sur notre planète, y compris l’homme, qui, par un processus encore inconnu à ce jour, est parvenu à la conscience, lui permettant de se questionner sur ses origines, comme nous le faisons ici.
1 – La chimie du vivant
2 – Panspermie : la vie tombée du ciel
Il était une fois la vie
Mais d’abord, la vie, c’est quoi ? Vaste question qui mériterait un dossier. Voici la définition du Larousse :
Caractère propre aux êtres possédant des structures complexes […] capables de résister aux diverses causes de changement, aptes à renouveler, par assimilation, leurs éléments constitutifs (atomes, petites molécules), à croître et à se reproduire.
Voilà qui est plutôt limpide. Mais qui n’indique en rien l’origine du vivant.
Tout au long de l’histoire, les hypothèses n’ont pourtant pas manquées :
- Les différentes cosmogonies et religions humaines ont principalement soutenu l’idée d’un ou plusieurs Dieux créateurs de la vie. Point de vue encore soutenu aujourd’hui par les créationnistes et d’une certaine manière par les partisans du « dessein intelligent »
- Depuis Aristote et jusqu’au XVIIIème siècle, l’hypothèse de la génération spontanée connut d’ardents défenseurs, . Elle expliquait que la vie naît de manière spontanée et quasiment immédiatement à partir de la matière inanimée.
- Dès la fin du XIXème siècle, l’hypothèse que la vie ait pu être amenée sur Terre depuis le cosmos par des microorganismes vivants sur des météorites est évoquée : c’est la panspermie, et nous y reviendrons.
Concrètement, soyons honnêtes, aujourd’hui nous ne savons ni :
- comment la vie est apparue sur Terre
- si elle existe ailleurs dans l’Univers
L’exobiologie, domaine en pleine expansion depuis la découverte des premières exoplanètes (les planètes qui tournent autour d’une autre étoile que notre Soleil) au milieu des années 90, a justement pour objet d’étude l’apparition et la diffusion de la vie dans l’Univers, sur Terre comme ailleurs. Ces deux questions sont en fait intimement liées. En effet, le jour où nous saurons comment la vie est apparue sur Terre, nous saurons quels sont les endroits les plus favorables pour la chercher ailleurs.
Pour le moment, nous n’avons qu’un seul laboratoire au sein duquel la vie est apparue : celui dont nous sommes issus et dont l’origine remonte à environ 4 milliards d’années, la Terre. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les exobiologistes recherchent la vie sur les astres célestes où les conditions sont proches de celles de la Terre. A terme, lorsque nos connaissances seront plus affinées, rien n’est exclu : certains chercheurs à contre-courant n’hésitent ainsi pas à imaginer une vie basée sur le silicium et non sur le carbone.
Tree of Life
Ne devrait-on pas ériger une statue en l’honneur de la cellule commune dont nous descendons tous ? Celle qui est parvenue à la vie, qui s’est retrouvée absolument seule sur la Terre, dans cet environnement encore hostile, et qui malgré l’adversité a pu se répliquer, essaimer ? Evidemment, la réalité est plus complexe, et cette cellule n’est pas apparue ex-nihilo, à partir de rien, comme le supposait l’hypothèse de la génération spontanée.
Il existe plusieurs racines élémentaires sur lesquelles l’arbre du vivant est apparu puis a grandi. C’est plutôt simple, les voici :
- Les lipides, constituant la membrane des cellules
- Les sucres complexes, source d’énergie des cellules
- Les protéines, pour favoriser certaines réactions chimiques
- L’ADN (acide désoxyribonucléique), pour stocker l’information génétique, c’est-à-dire toutes les particularités qui fondent une espèce ; et l’ARN (acide ribonucléique), qui traduit les informations de l’ADN et bâtit à partir d’elles.
Voilà. Ce sont les constituants de base de la cellule, la plus petite unité biologique capable de se reproduire. Vous, moi, les ornithorynques, les arbres… En somme tout ce qui est vivant sur cette planète est composé de ces éléments, briques élémentaires du mur de la vie. Et puis il faut un environnement pour se développer : ce sera l’eau. Pas de vie sans eau. D’ailleurs toutes les formes de vie se composent d’environ 80 % d’eau.
Nous ne sommes guère plus avancés. Nous avons décomposé la structure d’une cellule, voilà tout. Et bien reculons encore un peu plus loin… D’où viennent ces quatre éléments fondamentaux ?
- Les lipides de la membrane se composent d’acides gras
- Toutes les protéines des êtres vivants se composent à partir de la combinaison de vingt acides aminés, des petites molécules organiques comprenant une fonction acide et une fonction amine, d’où leur nom !
- L’ADN et l’ARN sont formés à partir de nucléotides, des molécules organiques
Et nous voilà donc avec, d’un côté, un plat complet : la cellule ; et de l’autre, cette série d’ingrédients indispensables à la vie telle que nous la connaissons sur Terre. La recette demeure toutefois inconnue, de même que le cuisinier. Par facilité, je pourrais invoquer ici Dieu, chef de haute volée qui ne révèle évidemment pas ses meilleures recettes, en tout cas pas dans la Genèse où les premiers êtres vivants sont des plantes :
Puis Dieu dit : Que la terre produise de la verdure, de l’herbe portant de la semence, des arbres fruitiers donnant du fruit selon leur espèce et ayant en eux leur semence sur la terre. Et cela fut ainsi. La terre produisit de la verdure, de l’herbe portant de la semence selon son espèce, et des arbres donnant du fruit et ayant en eux leur semence selon leur espèce. Dieu vit que cela était bon. Ainsi, il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le troisième jour.
Si la communauté scientifique n’est pour l’instant pas parvenue à fournir de réponse définitive à cette question passionnante, cela ne l’empêche pas de fournir de nombreuses hypothèses. Aujourd’hui, pour rester sur nos métaphores cuisinières, nous allons parler de soupe.
Mange ta soupe, ça fait grandir
Quelque petite mare chaude, en présence de toutes sortes de sels d’ammoniac et d’acide phosphorique, de lumière, de chaleur, d’électricité, etc. […] un composé de protéine fut chimiquement formé, prêt à subir des changements encore plus complexes.
Voilà comment Darwin imaginait dans une lettre de 1871. Retravaillée et complétée, cette hypothèse dite de la « soupe primitive » est peut-être celle qui est la plus populaire parmi la communauté scientifique. Elle fut notamment défendue par le biologiste américain Stanley Miller qui, en 1953, mit au point une expérience particulièrement étonnante avec son collègue Harold Urey.
L’objectif ? Rien de moins que de recréer en laboratoire les conditions chimiques primitives présentes sur Terre avant l’apparition de la vie, soit il y a environ 4 milliards d’années. Voici donc les ingrédients utilisés dans sa recette :
- Un mélange de plusieurs gaz (méthane, ammoniac, hydrogène), présents sur notre Terre primitive
- De l’eau chauffée, l’océan
- De l’électricité, pour simuler des éclairs
Des conditions finalement assez proches de celles décrites un siècle plus tôt par Darwin. Après une semaine d’expérience, le temps était venu pour Miller et Urey d’analyser cette étrange soupe primordiale. Que remarquèrent-ils alors ? Rien de mois que la présence de onze acides aminés, ainsi que du sucre, des lipides, et des composants des acides nucléiques ! Oui, les briques essentielles de la vie, recrées dans les petites fioles d’un laboratoire…
Toujours controversées aujourd’hui, l’expérience de Miller a été répétée de nombreuses fois, avec des variantes différentes, donnant des résultats plus ou moins prometteurs. L’idée de pouvoir recréer une atmosphère en laboratoire est dans tous les cas extrêmement intéressant pour les exobiologistes. En effet, il sera très bientôt possible, grâce notamment au télescope spatial James Webb (successeur d’Hubble), d’analyser l’atmosphère des exoplanètes, et donc pourquoi pas de la recréer en laboratoire, pour deviner, à plusieurs années-lumière de distance, quels mystères s’y cachent…
Avec Miller, la quête de nos origines perd un peu de magie : la vie, finalement, ne serait rien d’autre qu’un ensemble de processus physiques et chimiques qui se produisent dès lors que les conditions sont suffisamment favorables.
Donc le grand jeu de la vie se serait entièrement déroulé sur Terre, aucun événement extérieur n’étant venu le favoriser. Une autre hypothèse, que je trouve personnellement infiniment plus fascinante et poétique, invoque au contraire une action venue du ciel. Evidemment, des objets célestes peuvent perturber la vie (nos regrettés dinosaures l’ont constaté…), peuvent-ils aussi la favoriser, voire l’apporter sur Terre ?
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bon article mais je précise juste que l’inerte n’existe pas et que la panspermie ne fait que repousser le problème …