AstrophysiqueCosmos

Poussières dans l’Univers

Nous ne sommes que poussières dans l’Univers.

Il suffira à celui qui voudra s’en convaincre de lever les yeux au Ciel, lors d’une nuit claire et dégagée, et de contempler ces milliers de points blancs qui nous surplombent. Ceux-ci sont appelés étoiles.

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La plus proche des yeux d’un observateur terrien se nomme Proxima. Elle est située dans la constellation du Centaure, visible dans le ciel Austral. Elle est située à 4,22 années-lumière de nos yeux. L’Univers étant ce qu’il est, c’est-à-dire aux dimensions tellement immenses qu’elles dépassent le champ de nos conceptions bassement humaines, parler en termes de kilomètres pour évaluer une distance n’est pas raisonnable. L’unité généralement utilisée est donc l’année-lumière, soit la distance que parcourt la lumière en une année. Une année-lumière équivaut ainsi à environ 10 000 milliards de kilomètres.

L’étoile Proxima se situe donc à 39 734 milliards de kilomètres des yeux d’un terrien, et elle est, rappelons-le, l’étoile la plus proche. Si d’aventure cet observateur décide de rejoindre la dite étoile, au moyen des technologies spatiales actuelles, il lui faudrait environ 420 000 ans avant d’arriver à destination.

Pour information, l’objet fabriqué de la main de l’homme qui se situe aujourd’hui à la distance la plus éloignée de la Terre est la sonde Voyager 1, lancée dans l’espace en 1977. Elle se situe à environ 18 milliards de kilomètres de la Terre, soit 4% de la distance qui sépare la Terre de Proxima du Centaure. Les scientifiques estiment qu’en 2025, cette sonde ne sera plus capable de communiquer avec la Terre, elle ne sera plus alors qu’un déchet cosmique parmi tant d’autres. Dans 40 000 ans, Voyager 1 s’approchera pour la première fois d’une étoile : Gliese 445.

Si la sonde ne sera plus active, les disques qu'elle contient devraient eux encore être là. Ils contiennent une série de sons, d'images et d'informations sur la Terre.
Si la sonde ne sera plus active, les disques qu’elle contient devraient eux encore être là.
Ils contiennent une série de sons, d’images et d’informations sur la Terre.

Aussi démesurées que semblent être ces distances, il faut bien considérer que nous restons là dans la proximité immédiate, dans le voisinage même, de notre chère petite planète bleue.

La Terre est située au sein du Système solaire, le nom donné à notre système planétaire. Un système planétaire est un ensemble d’objets gravitant autour d’une étoile. Dans le cas du Système Solaire, 8 planètes, dont la terre, gravitent autour de notre étoile, le Soleil. 150 millions de kilomètres séparent la Terre du Soleil, soit 8 minutes lumière, la distance parcourue par la lumière en 8 minutes, rappelons-le.

Le Système Solaire est situé sur le bras d’Orion, en périphérie de la Voie Lactée.

Notre galaxie, la Voie Lactée, a une taille d’environ 100 000 années-lumière, soit 10 000 milliards de kilomètres multiplié par 100 000 ; et elle comporte environ 300 milliards d’étoiles similaires au Soleil. Autour  de ces étoiles gravitent un ensemble de planètes. Ces planètes, extérieures à notre Système Solaire, sont appelées des exoplanètes. La première exoplanète a été découverte en octobre 1995 par deux suisses. Depuis, on en découvre chaque année un peu plus. Chiffre dérisoire : en 2014, l’homme a découvert au total moins de 2000 exoplanètes sur un chiffre estimé au minimum à 50 milliards dans notre galaxie, la Voie Lactée.

Eloignons-nous encore un peu plus dans le vertigineux cosmos. La Voie Lactée est voisine d’une autre grande galaxie, appelée Andromède, et d’un cortège une cinquantaine de galaxies à la taille plus réduite. Cet ensemble est appelé un groupe de galaxies. Entre ces galaxies, le vide intersidéral, omniprésent, rendant impossible tout espoir de rejoindre ces mondes dans un futur proche. Le vide, qui représente 90 pour cent du volume de l’Univers, chose que les magnifiques images astronomique ont tendance à nous faire oublier. Dans un futur lointain, dans 4 milliards d’années, la Voie Lactée entrera certainement en collision avec sa voisine Andromède, toutes deux victimes de leur déplacement inéluctable et invisible à nos yeux, et de ce chaos naîtra peut-être une nouvelle galaxie, encore plus immense, et dont les scientifiques ont déjà trouvé le nom : Milkomeda.

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Panorama de cette future collision depuis la Terre.

Quittons encore un peu plus l’enveloppe désormais ridicule que constitue cette minuscule boule appelée la Terre. Ce groupe de galaxies est lui-même aggloméré auprès d’un millier d’autres galaxies, aux formes, tailles et couleurs variables, séparées les unes des autres par le vide intersidéral. Cet ensemble est appelé un amas de galaxies.

Ô quel désir pousse l’homme à cartographier ainsi l’infiniment grand autour de lui, ne faisant que lui confirmer l’inutilité de son existence éphémère à l’échelle de l’Univers ? Serait-ce pour ressentir cet agréable frisson devant les choses qui nous dépassent, autrefois de l’ordre du divin, aujourd’hui de l’ordre de la Science ?  Serait-ce pour retrouver le sentiment d’accomplissement des grands explorateurs d’autrefois face à la découverte de l’inconnu ? Serait-ce pour relativiser les tracas du quotidien ? Pour se dire que finalement, face à ces échelles si immenses que le pauvre cerveau humain ne peut même pas les concevoir, toutes nos pathétiques existences ne sont que poussières, et que, définitivement, se chagriner pour cet emploi perdu, pour cette femme partie, pour ce parent disparu n’en vaut point la peine. Un meurtre ou un suicide n’aurait aucune espèce de conséquence, dans un espace-temps aussi éphémère, pas plus que la mort d’une fourmi sous le pied d’un randonneur.

Allons, il est temps de nous éloigner à nouveau. Les amas de galaxies sont eux-mêmes contenues dans des ensembles appelés des superamas, qui peuvent agglomérer des milliers de galaxies.

Parmi ces superamas, celui qui englobe la Voie Lactée, immense structure cosmique à la taille étourdissante : un demi-milliard d’années-lumière de diamètre. Son nom est Laniakea, ce qui signifie en polynésien horizon céleste immense. Découvert en 2014 par quatre scientifiques, R. Brent Tully, Hélène Courtois, Yehuda Hoffman et Daniel Pomarède, Laniakea redéfinit la géographie assourdissante de l’Univers.  Une chevelure englobant des milliards et des milliards de mondes, un continent du cosmos, au beau milieu duquel nous vivons et respirons, tâchant de ne point trop y penser, pour éviter de ressentir un immense vertige… Laniakea et ses galaxies qui, inlassablement, se déplacent à plusieurs centaines de kilomètres par seconde vers un point précis mais encore bien mystérieux appelé le Grand Attracteur.

laniakea
Laniakea. Parfaitement, c’est bien la Voie Lactée à droite.

Laniakea est actuellement le plus grand superamas découvert, la plus grande structure classifiée dans l’Univers. Il reste maintenant à découvrir les continents voisins de Laniakea.

Z8-GND-5296 dans toute sa beauté primitive.
Z8-GND-5296 dans toute sa beauté primitive.

Nous arrivons maintenant aux confins du cosmos. Notre voyage est sur le point de s’achever. Non pas parce que nous atteignons une frontière ou un mur infranchissable, mais parce que les lois de la physique nous empêchent d’aller plus loin. C’est le concept dit de l’univers observable, c’est-à-dire de l’Univers que nous pouvons observer depuis la Terre. Lorsque nous observons le Soleil, nous le voyons tel qu’il était il y a 8 minutes, le temps que la lumière parvienne jusqu’à nos yeux.  De la même manière, nous voyons Jupiter avec 43 minutes de retard. La galaxie d’Andromède avec 2,5 millions d’années de retard. Plus nous regardons loin, plus nous voyageons dans le temps. Seulement, nous ne pouvons pas voir au-delà d’un certain point de l’Univers, puisqu’alors nous arriverions jusqu’à la création de l’Univers suite au Big-Bang il y a environ 13,8 milliards d’années. Autrement dit, la lumière issue du point le plus lointain observable depuis la Terre aura mis 13,8 milliards d’années pour nous parvenir. Mais l’univers étant en continuelle expansion, ce point s’est depuis éloigné de notre Terre. La taille de l’univers observable est ainsi estimée à 40 milliards d’années-lumière. La galaxie la plus lointaine jamais observée est ainsi z8_GND_5296, située à 30 milliards d’années de la Terre et que nous observons telle qu’elle était il y a 13,1 milliards d’années. Au-delà de cet horizon cosmologique, que trouve-t-on ? Nous n’en savons rien, et à jamais nous n’en saurons rien, à moins de s’y déplacer, ce qui est impossible pour le moment, et le restera longtemps. S’y trouvent certainement d’autres superamas de galaxies, d’autres milliards de galaxies, de milliards de milliards d’étoiles et de planètes. Quand bien même notre Univers contient déjà 200 milliards de galaxies, et que ces galaxies peuvent contenir plus de 200 milliards d’étoiles comme notre Soleil, quelle frustration de savoir ces mondes au-delà de l’univers observable demeurer à jamais hors de notre portée visuelle ! De même, quelle frustration de savoir la sonde Voyager 1 atteindre à peine l’espace intersidéral, à la fois si loin de nous et pourtant si proche, n’ayant pas fait encore un pas sur la longue route qui mène à Gliese 445, à 1,7 année-lumière de la Terre, distance ridiculement grande ou petite selon le point de vue employé.

Quelle horreur de constater combien nous sommes perdus, seuls à tout jamais au milieu de nulle part, n’ayant que les timides avancées de la science et ses images de galaxies et de phénomènes cosmiques inaccessibles, pour seule consolation…

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